Interview : Kirill Sokolov réalisateur & scénariste

Après s’être fait la main sur une poignée de courts conçus comme des cartes de visite, Kirill Sokolov effectue ses débuts dans le long-métrage avec Why Don’t You Just Die!, un huis clos gore dont l’aspect transgressif détonne dans le panorama russe contemporain. Revendiquant sans rougir son statut de réalisateur postmoderne, Sokolov nous explique pourquoi il est si difficile de trouver sa place au sein d’une industrie locale plutôt réfractaire aux séries B sociales et provocatrices.
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Comment s’est effectué votre passage du court au long-métrage ?

Après mon premier court, je me sentais déjà prêt à tourner un long-métrage, alors qu’en fait, ce n’était pas du tout le cas ! (rires) Mais comme je ne connaissais personne dans le milieu à l’époque, je ne suis pas parvenu à monter ce projet. Ce qui m’a été bénéfique au final, car je pense que le résultat n’aurait pas été bon. J’ai alors décidé de tourner un second court, puis un troisième, puis un quatrième, tout ça afin de rencontrer des gens de l’industrie. Il faut savoir que j’ai une formation de physicien, et c’est en tournant des courts diffusés en festivals que je suis parvenu à rencontrer des producteurs susceptibles de travailler avec moi. Reste qu’aucun de mes cinq courts ne m’a finalement permis de tourner un long dans la foulée ! J’ai finalement suivi une formation de chef-opérateur pendant deux ans et j’ai fini par trouver un producteur qui a accepté de monter Why Don’t You Just Die!. Comme j’écris constamment des scripts de longs – depuis mon premier court, en fait –, j’avais déjà plusieurs histoires en stock quand je l’ai rencontré. Why Don’t You Just Die! est le quatrième script que j’ai écrit. Heureusement que personne n’a lu les deux premiers, car ils sont très mauvais ! Le troisième était quant à lui une comédie gore déjantée que j’ai développée avec le même producteur que Why Don’t You Just Die!, mais cela n’a pas abouti. C’est finalement Why Don’t You Just Die! qui a fini par voir le jour, même si le processus a été très long pour parvenir à monter ce film.


Vous semblez avoir pris en compte les limites budgétaires dès l’écriture du script : votre film se déroule dans un décor quasi unique et vous limitez au maximum le nombre de personnages présents à l’écran.

Oui, c’est vrai. Mais le film n’est pas un simple drame non plus : il y a des cascades, des effets spéciaux et des décors, ce qui coûte de l’argent. Je ne voulais pas tourner un petit film bavard à peu de frais, car j’aime les films dynamiques, aux enjeux narratifs excitants. Voilà ce que je voulais accomplir, même si ça n’a pas été facile ! J’avais beau n’avoir qu’un seul décor et cinq acteurs sous la main, je voulais que mon film soit rempli d’action, de bagarres et d’effets spéciaux. Ce qui m’a rendu la tâche encore plus difficile, c’est que ce type de productions n’existe pas en Russie, où l’on tourne surtout des comédies décontractées, des films patriotiques et des longs-métrages d’art & essai. Autant dire que le mélange proposé par Why Don’t You Just Die! n’est pas commun chez nous. Il est très difficile de faire exister un tel projet en Russie. Heureusement, certains producteurs ont compris que ce genre de films pouvait attirer les acheteurs de marchés comme ceux de Cannes ou de Los Angeles. Certes, ils ne gagneront pas beaucoup d’argent, mais ils en retireront une vraie visibilité. Un film comme Why Don’t You Just Die! peut résonner auprès du grand public, même s’il arbore certains stigmates du film d’auteur. C’est d’ailleurs drôle de voir que le public étranger y est plus réceptif que le public russe, sans doute parce que ce dernier n’est pas vraiment habitué à ce type d’expérience un peu hybride. 


C’est un peu la même chose en France : les films de genre locaux connaissent généralement plus de succès à l’étranger que dans nos salles de cinéma. 

Ce que nos producteurs ne comprennent pas, c’est que ce genre d’histoires peut être aussi très ludique. À la lecture du script, ils n’arrivaient pas à percevoir l&rs [...]

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