HOMMAGES : Tobe Hooper 1943-2017

Six semaines après le décès de George Romero, il aura fallu affronter le départ d’une autre légende : Tobe Hooper, créateur de Massacre à la tronçonneuse et d’une demi-douzaine d’autres classiques inimitables. Un hommage s’imposait, et nous avons exhumé pour l’occasion un entretien inédit, enregistré à L’Étrange Festival 2010 juste avant la première projection française d’Eggshells.
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Pendant des décennies, Massacre à la tronçonneuse est perçu comme le premier ébat cinématographique de Tobe Hooper ; coup d’essai, coup de maître, comme le veut l’adage. La découverte d’Eggshells sur grand écran en 2010 (le film sortira peu après en Angleterre chez Arrow dans un Blu-ray somptueux) fait l’effet d’un électrochoc. Ému, Hooper vient présenter l’objet sur scène en s’efforçant de rappeler son contexte créatif, et son optimiste suranné à l’heure où l’Amérique s’enlise dans la Guerre du Vietnam. Peu avant la séance, dans un salon capitonné du Forum des Images, il nous avoue avoir fait carrière quasiment par erreur dans le cinéma d’horreur. « À mes débuts, je ne voulais absolument pas tourner de films d’épouvante. Eggshells était pensé comme une oeuvre expérimentale à la vision communautaire très positive : le film dit en substance qu’on a besoin des autres et de leur conscience pour exister… Et c’est l’exact opposé de ce que défend Massacre à la tronçonneuse. » Tourné en 16 mm pour une bouchée de pain avec des amis de l’époque (dont Kim Henkel et Allen Danziger, qui reviendront sur Massacre à la tronçonneuse), Eggshells est un délire artistique visuellement somptueux et globalement incompréhensible, quasiment dénué de dialogues et empilant les idées visuelles géniales (le combat à l’épée dans la cave !) avec une frénésie presque compulsive. Esthète inspiré, Hooper met son âme dans le projet… mais ne trouve personne à qui le vendre. Bouclé en 1969 et présenté à quelques malheureux spectateurs, le film dort dans un placard pendant 40 ans, avant d’être ressuscité en copie restaurée au festival South by Southwest d’Austin, Texas. « Pour être honnête, j’ai écrit Massacre à la tronçonneuse en réaction à l’échec commercial de mon premier long-métrage. Si je n’avais pas eu d’énormes dettes à rembourser, il n’y aurait sans doute jamais eu de Massacre à la tronçonneuse ! » Les frustrations de Hooper vis-à-vis d’une société hostile aux discours bienveillants et de sa propre incapacité à trouver sa place dans l’industrie hollywoodienne provoquent un virage stylistique à 180 degrés. Reflet inversé d’Eggshells, Massacre à la tronçonneuse déverse tout le mal-être d’une société meurtrie au plus profond de sa chair. Si le film reprend de nombreux éléments de son prédécesseur (la maison perdue au milieu de nulle part, notamment), il les réorganise au sein d’un cauchemar hypnotique duquel il est difficile de détourner le regard ne serait-ce qu’une seule seconde. Massacre à la tronçonneuse brandit une violence sèche (il n’y a presque aucune effusion de sang) pour aspirer son spectateur dans un vortex étrange, aux émanations de chaleur écrasantes et aux données temporelles faussées (on passe de la nuit au jour durant le dîner final, sans logique apparente). À la fois poisseux et visuellement sublime, le film provoque un raz-de-marée à sa sortie en 1974… Et huit ans plus tard en France, censure giscardienne oblige.



MISTER SARDONICUS
Peu concerné par le destin de son long-métrage dans l’Hexagone, Tobe Hooper enchaîne rapidement sur Le Crocodile de la mort, un autre shocker inconfortable où le tenancier d’un hôtel texan jette ses clients en pâture à un crocodile domestique. « Mes parents ont tenu un hôtel au Texas. Ma grand-mère me racontait des histoires terrifiantes sur un croquemitaine du nom de « Slish-Slash » qui passait son temps à décapiter les gens. J’ai une très grande famille, qui a connu de nombreux décès au fil des années. Enfant, j’ai donc assisté à de nombreux enterrements. Dans le Sud, on célèbre la mort, on la regarde en face, et elle est parfois festive, pour ne pas dire joyeuse. Ma manière de mettre en scène l’horreur vient sans doute de ce que j’ai pu vivre au Texas. » Lançant la carrière horrifique d’un certain Robert Englund, Le Crocodile de la Mort confirme après Massacre à la tronçonneuse le sens de l’humour très singulier du réalisateur. Tourné en 1981 pour exploi [...]

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Commentaire(s) (3)
Dario Bava
le 09/09/2017 à 15:46

POUR QUI SONNE LE GLAND, de Sam Woodyoueatmycucumber

christianpcmm
le 11/09/2017 à 23:28

Ha ha ha ha ha, t'es con. Blague plus finaude qu'elle en a l'air.

Dario Bava
le 12/09/2017 à 01:16

C'est malin Christ, avec le jeu que tu as lancé, je ne peux désormais m'empêcher de saloper les hommages funèbres à Tobe Hooper.
Chuck a bien raison, nous sommes d'irréductibles evil madnautes, hin hin hin !

Ah, et bien sûr : QUE LES GROS SALAUDS SE LÈCHENT LE DOIGT (après l'avoir laissé traîné dans Montcuq), de Denys Braquemart-Deferre.

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