WATCHMEN SAISON 1
La nostalgie est une drogue. Littéralement. C’est ce qu’explicite Damon Lindelof dans le sixième épisode de son adaptation de l’oeuvre de Dave Gibbons (et d’Alan Moore bien sûr, mais chut, il ne veut pas que son nom apparaisse au générique !). Des petites pilules personnalisées qui permettent de revivre ses propres souvenirs… ou ceux des autres si on se trompe de flacon. Une drogue qui permet de vivre dans le passé plutôt que dans le présent. Au-delà d’un simple gimmick scénaristique qui permettra à l’épisode en question de prendre la forme d’un hallucinant flash-back – démontrant au passage la virtuosité du projet malgré deux premiers épisodes assez déroutants, voire austères –, Lindelof se permet de commenter la culture du « c’était mieux avant ». Le cocréateur de Lost et The Leftovers plie ainsi Watchmen à sa vision, à la fois radicalement différente de la BD (on se sent presque perdu), mais pourtant diablement cohérente dans sa richesse thématique, pour peu que l’on prenne la peine de gratter un tant soit peu la surface des choses…
CRISIS IN DC
Il est vrai que Watchmen est le totem inamovible des passionnés de super-héros. Le « Citizen Kane du justicier costumé ». Une oeuvre réputée intouchable. Après tout, il n’y a jamais eu de Citizen Kane 2 ! Le titre arrive sur les étals fin 1986, une époque où le monde du comic-book est lui-même en proie à de profonds chamboulements. À la traîne depuis des décennies derrière son concurrent Marvel, l’éditeur DC Comics (celui de Batman, Superman et Wonder Woman) a sorti l’année précédente la maxi-série Crisis on Infinite Earths qui a totalement révolutionné sa mythologie et fusionné son multivers fait de Terres parallèles (une saga d’ailleurs adaptée en ce moment même sur le petit écran dans le « Arrow-verse » réunissant les séries télé Arrow, Flash et Supergirl). Cette révolution à peine achevée, la série qui redéfinit complètement Batman est lancée début 1986 : The Dark Knight Returns de Frank Miller et Klaus Janson influencera considérablement Christopher Nolan pour sa trilogie.
Le troisième gros morceau qui achève la mue des comics DC et marquera à tout jamais un véritable renouveau du genre intervient fin 1986, avec la maxi-série en douze numéros mensuels de Dave Gibbons et de « vous savez qui ». Initialement, DC souhaite que Watchmen serve de tremplin aux personnages de l’éditeur Charlton qu’il vient d’absorber (et qui apparaissent d’ailleurs dans Crisis on Infinite Earths) : Peacemaker, The Question, Blue Beetle, Captain Atom… Ces super-héros quelque peu oubliés de l’Âge d’Or sont donc destinés à être sérieusement maltraités, voire éliminés. Mais pour leur éviter ce funeste destin, « celui que l’on ne doit pas nommer » préfère créer des doppelgängers : le Comédien, Rorschach, Owl Man, Dr Manhattan… Des personnages totalement inédits, mais qui vont rapidement devenir des icônes.
Watchmen présente un monde en pleine Guerre froide, au bord du conflit nucléaire mondial, avec pour symbole la « doomsday clock », l’horloge de la fin du monde qui avance inexorablement. Dans cette réalité, des justiciers masqués – les Minutemen – sont apparus dès les ann&eacu [...]
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