Us de Jordan Peele

Us

La fillette apeurée en couverture du mois dernier préfiguraitelle la réaction de la Mad Team lors de la projection de Us ? Jordan Peele a-t-il confirmé les espoirs placés en lui après le phénomène Get Out ? Ou n’était-ce que le coup de bol d’un petit malin dont le second film prouve la vacuité ? Toutes ces questions trouveront réponse dans le débat (forcément bourré de spoilers) qui suit : vous n’avez plus qu’à lire !
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F.F. Us est un deuxième long-métrage, et comme on a coutume de le dire, le deuxième film est un peu un test pour un réalisateur. Get Out avait reçu un accueil assez dément à sa sortie et Mad a probablement été l’un des rares magazines à lui avoir réservé une réception certes enthousiaste, mais néanmoins modérée… Aucun de nous n’avait crié au chef-d’oeuvre, par exemple. Nous avions déjà pointé du doigt des défauts d’écriture qui, selon moi, sont amplifiés dans ce second film.

G.E. Get Out est un film qui a plutôt bien vieilli dans ma tête. Je trouve que tout le discours sur cette espèce d’attraction/répulsion – notamment au niveau sexuel – que l’Amérique éprouve envers le peuple afro-américain est très pertinent. C’est quelque chose que l’on voyait beaucoup dans le cinéma américain des années 70 et qui s’était un peu perdu depuis.

F.C. Get Out était un film difficile à accueillir sereinement. Déjà parce que le projet était inattendu de la part de Jordan Peele, qui avait jusque-là principalement oeuvré dans la comédie. Ensuite, parce que le cinéma d’horreur a de plus en plus de mal à créer l’enthousiasme sur des projets originaux. Le film a bénéficié d’une campagne marketing très intelligente qui brassait justement toutes ces données. Après, je pense que l’accueil de Get Out par Mad Movies était assez lucide, car il fallait réussir à mettre de côté toute cette hype et se pencher sur les qualités intrinsèques du film. Et je pense que c’est ce même effet de hype qui fait aujourd’hui beaucoup de mal à Us. Et puis, inévitablement, le succès de Get Out a changé la façon qu’a Jordan Peele d’appréhender le cinéma. Get Out est un bon film de genre mais ce n’est certainement pas le chef-d’oeuvre que beaucoup y ont vu.

L.D. Et ça ne méritait clairement pas un Oscar du meilleur Scénario…

F.C. Tout à fait, mais je pense que tout cela a modelé la façon dont le public et la critique ont accueilli Us. J’ai l’impression qu’il y a de nouveau un énorme rejet d’un côté, et un encensement déraisonné de l’autre.

A.P. En ce qui me concerne, j’ai un problème avec le ton du film. J’aimais bien celui de Get Out, avec ce mélange de comédie et d’horreur qui était très bien géré. Je trouve que cet aspect-là est beaucoup moins maîtrisé dans Us. Le personnage du père, par exemple, n’est jamais crédible. Je ne sais pas d’où vient le besoin de Peele de ridiculiser le père. Est-ce pour surfer sur la vague de films de « femmes badass » que l’on a vue arriver dernièrement ? Il y a beaucoup de choses qui me gênent dans le film mais en premier lieu, c’est cette sauce horreur/humour qui ne prend jamais.



L.D. Je ne ressens pas dans Us cette volonté de faire un film d’horreur humoristique. C’est un film d’horreur avant tout, parsemé de quelques saillies comiques. Contrairement à toi Alexandre, j’avais trouvé l’inclusion de l’humour dans Get Out assez maladroite. Alors qu’avec Us, je n’ai pas l’impression que Jordan Peele cherche à être drôle à tout prix.

F.C. Le fait que le personnage du père ne s’affirme pas me semble logique lorsque l’on voit le twist du film.

L.D. C’est totalement logique par rapport au sujet. Mais avant de revenir au twist et à l’éclairage qu’il jette sur le film, je voulais revenir sur les personnages. En fait, ce sont déjà des coquilles vides. Ils rencontrent leurs doubles mais c’est un peu le vide qui rencontre le vide. Pour moi, le fait que les deux familles soient très peu « incarnées » est voulu. C’est assez frappant quand on y réfléchit. Nous ne savons même pas ce qu’ils font comme boulot et on s’en fout complètement, ce sont des gens dont les seuls sujets de discussion sont leurs possessions matérielles et dont le seul but est d’atteindre l’image d’une réussite sociale qu’ils voudraient renvoyer aux autres. Je pense que c’est extrêmement voulu. Ce que les doubles doivent remplacer, c’est ce vide existentiel, ce vide américain.

F.C. C’est un thème récurrent du cinéma d’anticipation et c’est un peu ce que l’on voyait dernièrement dans Alita : Battle Angel : les gens du bas contre les gens du haut.

L.D. À ce titre, il n’est pas étonnant qu’on voie dans le premier plan du film une VHS de C.H.U.D.… Pour revenir au twist final, l’overdose d’explications qu’il entraîne est le principal [...]

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