Toute première fois N°320

Change of Mind

Change of Mind erre dans les limbes depuis sa distribution en 1969 et y passera probablement le restant de ses jours, jusqu’à ce que le cinéma meure. Et pourtant, même s’il ne s’agit pas d’un de ces soi-disant chefs-d’oeuvre oubliés, ce drame de science-fiction constitue une surprise de taille. Pour la toute première fois de l’Histoire du 7e Art, le cerveau d’un Blanc est transplanté dans le corps d’un Noir et Robert Stevens, réalisateur de la chose, accouche quelque part (et très certainement) de l’arrière-grand-père du très prisé Get Out de Jordan Peele.
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Qu’est-ce qui fait l’Homme ? Le corps ou l’esprit ? Les deux, répondit le vieux sage en marmonnant dans sa grande barbe blanche. Qui est-on vraiment ? Le corps motive-t-il l’esprit ou bien est-ce l’esprit qui détermine le corps ? Les deux, répondit le vieux sage en lissant sa grande barbe toujours blanche. Soirée théma en perspective ! Alerte rouge et tous aux abris ! Corps étranger pour matière grise en vadrouille. Après tout, qui n’a jamais rêvé de se réveiller dans le corps d’un ou d’une autre, pour le pire ou le meilleur ? Sur le papier, Change of Mind n’intrigue pas plus qu’une brouettée de romans, de nouvelles, de films d’exploitation et d’auteur. Des machins plus ou moins digestes, plus ou moins réussis, plus ou moins graphiques, osés, retenus ou excessifs, basés sur le même grand fantasme de la transplantation du cerveau. Au mieux, on peut s’amuser du dépliant publicitaire d’époque. Car passées les premières accroches fleuries – « La première greffe du cerveau au monde » et « Un changement de vie, un changement d’amour » –, le document propose un petit jeu impensable à reproduire aujourd’hui. Un petit test qui invite clairement à se poser la question « Si le cerveau d’un Blanc est transplanté dans le corps d’un Noir, est-ce que cela changerait cet homme ? » S’ensuit une série d’interrogations avec, pour chacune, des cases « oui » ou « non » à cocher. Resterait-il avec sa femme ? Chercherait-il la compagnie de femmes noires ? Aimerait-il différemment ? Croirait-il différemment ? Pour vérifier vos réponses, une seule solution : se rendre immédiatement dans la salle obscure la plus proche pour voir Change of Mind ! L’exploitation poussée dans ses derniers retranchements. Incroyable, invraisemblable et insensé ! Mais peut-être pas tant que ça. Tout simplement parce que nous sommes aux USA à la fin des années 60. La période est brûlante et les changements nombreux. Si le Civil Right Act signé par le président Lyndon Johnson en 1964 déclare illégale la discrimination raciale et religieuse, ce n’est que trois ans plus tard que la Cour Suprême des États-Unis autorise les mariages interraciaux. L’Amérique du Nord disait enfin oui à l’amour en noir et blanc. Pile un an avant la sortie de Change of Mind. Pile le temps qu’il faut pour écrire, tourner et distribuer un film capitalisant ouvertement sur un sujet de société qui met à l’époque le pays sens dessus dessous. Aujourd’hui, l’idée peut faire sourire. D’ailleurs, un an à peine après la sortie de Change of Mind, le réalisateur Melvin Van Peebles, le père de la blax [...]

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