Toute première fois N°310
Docteur X
Le pays coulait. Tranquillement mais sûrement. Le peuple se serrait la ceinture et maudissait la Grande Dépression qui ravageait le pays depuis la fin des années 20. Des milliers de personnes s’agglutinaient autour des soupes populaires ; un bol de bouillon fadasse, un morceau de pain et pas de travail. Dans les salles obscures, des monstres imaginaires attiraient des foules frissonnantes et les aidaient à oublier la catastrophique situation économique. La dureté des temps a toujours été une aubaine pour le film d’horreur. Le Dracula de Tod Browning essuie les plâtres et, quelques mois plus tard, Frankenstein passera la cinquième. Universal échappe à la faillite, claque le jackpot et botte le cul des autres grands studios, qui ne tarderont d’ailleurs pas à répondre plus ou moins rapidement. The Spider, produit par la Fox, mêle magie et meurtre tout en surfant maladroitement sur la popularité des pièces de théâtre à mystère très en vogue à la fin des années 20. La Paramount met directement les pieds dans le plat de la Universal en proposant une remarquable adaptation de L’Étrange cas du docteur Jekyll et de M. Hyde. Aussi en retard que le lapin d’Alice au pays des merveilles, la MGM mord la poussière à cause des phénomènes de foire malheureusement trop réels de Freaks et la RKO emporte le morceau avec le véloce Les Chasses du comte Zaroff. En 1931, à peine quelques semaines après la sortie de Dracula, la Warner, qui s’était fait une spécialité du film de gangsters à tendance incorrecte et sociale, annonce contre toute attente la mise en chantier de Docteur X avec… Bela Lugosi ! Coup de pub, de bluff et poudre aux yeux, vas-y que je t’embrouille ! Cette même année, l’ancien scénariste Darryl F. Zanuck est promu à la tête du département production du studio. Cigare vissé aux lèvres, allure de médecin généraliste et flair de chien truffier : le docteur Z en action. C’est lui qui distribue ordonnances, sujets et scénarios à son régiment de scénaristes et de réalisateurs. Mais surtout, c’est lui qui va re-populariser la comédie musicale (Footlight Parade, 42ème rue…), et c’est encore lui qui met en chantier cette fameuse série de films policiers factuels, violents et dépouillés (L’Ennemi public, Le Petit César, Je suis un évadé…) qui feront la gloire de la Warner. Mais pour une fois, le docteur Z suit l’avis de ses collègues et cède aux sirènes de l’horreur. Sans prendre de risque, ou presque.
SATAN EN PERSONNE
En décalquant le schéma qui fit le succès de Dracula, le studio se porte acquéreur – pour la somme rondelette de 5000 dol [...]
Il vous reste 70 % de l'article à lire
Ce contenu éditorial est réservé aux abonnés MADMOVIES. Si vous n'êtes pas connecté, merci de cliquer sur le bouton ci-dessous et accéder à votre espace dédié.
Découvrir nos offres d'abonnement