Toute première fois N°305

L'Ecureuil rouge

Au début des années 90, Julio Medem, le plus basque des réalisateurs espagnols, représentait une alternative de choix face à l’hégémonie du surexposé Pedro Almodóvar. Son Écureuil rouge, qu’il réalise en 1993, est bel et bien là pour le prouver. Cet insensé jeu de pistes, placé sous haute influence hitchcockienne, ne ressemble à rien de connu. Surréaliste, ludique, sensuel et rêveur, l’ambitieux et mystérieux écheveau n’en finit pas de fasciner.
Array

La polémique enfla, enfla et enfla encore, jusqu’à devenir un épais nuage gris foncé chargé d’électricité. L’orage ne dépassa pas les Pyrénées. Mais dans la péninsule ibérique, une tempête de réactions hostiles s’abattit sur Julio Medem. En 2003, treize ans après L’Écureuil rouge, le réalisateur déclenche la controverse avec La Pelote basque, la peau contre la pierre. L’énergique documentaire, qui entrecroise les paroles de plus de 70 intervenants, tente d’en découdre avec le problème du conflit basque, quitte à égarer les non-initiés. Mais en Espagne, la question est épineuse. Très épineuse. Trop partisan de la cause indépendantiste selon certains, La Pelote basque… met un sérieux coup de frein à la carrière d’un cinéaste qui présentait son film comme le fruit d’une nécessité du fait de ses origines basques. D’ailleurs, en 1991, son premier long-métrage, Vacas, dealait déjà avec la société basque. De la guerre carliste de 1875 à la guerre civile de 1936, la vaste fresque rurale s’étalait sur plus de 60 ans d’histoire et contait les rapports conflictuels de deux familles sous le regard de trois générations de vaches ! Univers clos, violence sourde et relation incestueuse. Medem n’y va pas avec le dos de la cuillère et pourtant, Vacas surprend et enchante de la première à la dernière image. Pendant que les très urbains Pedro Almodóvar et Bigas Luna se déploient dans les villes, Medem, de son côté, cultive un sens du tragique et un amour de la nature qui avaient totalement disparu du cinéma espagnol. Mais le plus étonnant reste cette facilité avec laquelle le cinéaste marie la fresque paysanne avec un fantastique insolite et champêtre. Alors que les familles se déchirent, un grand-père révèle à son petit-fils les étranges sortilèges de la forêt environnante. Atmosphère magique et bovidés placides. La caméra traverse les fougères, et l’intime et l’Histoire se croisent et se décroisent. Bref, un premier coup d’essai transformé en coup de maître par l’assurance de son metteur en scène, maitrisant aussi bien le mysticisme que le temps et l’espace.


LIBERTÉ DE TON

Avec Vacas, Medem donne l’impression de jouer directement dans un stade sans passer par l’étape cabaret des apprentis. Bien sûr, le bonhomme a perdu ses dents de lait sur toute une série de courts-métrages tournés à partir de 1974, d’abord en Super 8 puis en 35 mm. Il ne fréquente aucune école de cinéma et poursuit des études de médecine avec la ferme intention de devenir psychiatre. De 1982 &agra [...]

Il vous reste 70 % de l'article à lire

Ce contenu éditorial est réservé aux abonnés MADMOVIES. Si vous n'êtes pas connecté, merci de cliquer sur le bouton ci-dessous et accéder à votre espace dédié.

Découvrir nos offres d'abonnement

Ajout d'un commentaire

Connexion à votre compte

Connexion à votre compte