Toute première fois N°301
La Semaine d’un assassin
Un hachoir ensanglanté. Un visage hurlant. Une fille à moitié nue. Une sensationnelle affiche racoleuse. Emballé c’est pesé. Selon les préférences nationales, le hachoir se plantait dans le visage et la dame disparaissait. Grosso modo, voilà comment fut vendu La Semaine d’un assassin à l’exportation. Les férus de sociologie fuyaient et les gastronomes de l’horreur se précipitaient devant les promesses du festin. D’un côté le refus, de l’autre la déception. Trop gore pour un circuit art et essai, trop « arty » pour la filière des films d’horreur. C’était le début des années 70. L’industrie locale tentait de se renouveler en créant une troisième voie. Un enjeu de taille, un numéro d’équilibriste périlleux situé à mi-chemin entre le film d’auteur et la production commerciale. Autrement dit, des films populaires critiques envers leur pays. La censure veillait, coupait et tranchait dans le lard. Trop érotique, trop violent, trop politique. Pour survivre, on épiçait les versions réservées à l’exportation. Plus érotique, plus violent. La politique, c’est une autre histoire. En attendant c’est tous, tous, tous à Torremolinos ! La Costa Brava, La Costa Del Sol en construction. Contexte difficile, mutation sociale inévitable et des touristes par brouettes en manque de chorizo. Le climat était propice à la schizophrénie.
FRUSTRATION SEXUELLE, VOYEURISME ET PARANOÏA
La Semaine d’un assassin, c’est l’histoire d’un boucher pris dans une spirale criminelle que rien ne peut enrayer. Le trouble-fête Eloy de la Iglesia (aucun rapport avec Alex) est aux commandes, bien décidé à taillader le système, à fouiller ses chairs. Un comble quand on sait que le bonhomme débuta dans le film pour enfants à l’âge de 22 ans. En 1966, Fantasia… 3 propose trois histoires pour les tout-petits, dont une adaptation du Magicien d’Oz ! Suivront Algo amargo en la boca (1968), un mélodrame paraît-il sordide, et Cuadrilátero (1969), qui disserte sur le monde corrompu de la boxe. Avec ce dernier, la censure tique mais laisse le gamin faire mumuse dans son bac à sable. El Techo de cristal, un thriller dans lequel une femme délaissée se persuade que sa voisine a assassiné son mari, propulse de la Iglesia dans les hauteurs. Succès critique et public pour un film sous haute influence hitchcockienne qui mêle frustration sexuelle, voyeurisme, solitude et paranoïa. La comédienne Carmen Sevilla, surnommée « la fiancée de l’Espagne », brise net son image d’actrice de comédies légères. Dans son coin, l’acteur Vicente Parra cherche à en faire autant. Il fut un roi de l’opérette filmée et de la bluette colorée dans les années 60. Regard de braise, chevelure noir de jais [...]
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