Toute première fois N°280

Lorsqu’il réalise en 1974 l’improbable LA REINE DU MAL, rien ne laisse présager qu’Oliver Stone deviendra par la suite l’un des réalisateurs les plus côtés de Hollywood. Aussi maladroit que touchant, ce galop d’essai à l’allure de mauvais rêve se paye même le luxe de réunir une étoile de la Hammer, Martine Beswick, et une star de la Factory d’Andy Warhol. Une rencontre qui définit parfaitement un film partagé entre genre et délire arty sous substances illicites.

La Reine du mal (Seizure en VO) est né, comme beaucoup de ses pairs, d’un cauchemar. Le mauvais rêve d’un jeune homme âgé d’à peine 25 ans. Dans ce dernier, ce qui semble être une femme, un nain et un géant noir séquestrent et assassinent un par un les invités de l’apprenti cinéaste. Nous sommes en août 1971 et Oliver Stone achève un parcours de deux ans à la New York University Film School où il bénéficie de l’enseignement d’un certain Martin Scorcese. Durant cette période, le bonhomme réalise trois courts-métrages. Le mystérieux Michael and Marie, Mad Man of Martinique, un étrange film de gangsters existentialiste, et surtout le très remarqué Last Year in Viet Nam, qui deale déjà avec sa terrible expérience de la guerre du Vietnam. Ce trio de courts distille des influences clairement françaises. Jean-Luc Godard, Alain Resnais, Claude Chabrol et toute la clique de la Nouvelle Vague se fondent à ces douloureux quatorze mois passés dans le bourbier vietnamien de septembre 67 à novembre 68. C’est chouette la guerre, on y gagne plein de décorations (Stone sera enluminé des prestigieuses Purple Heart et Bronze Star) avec, en prime, de joyeux souvenirs qui procurent des nuits très agitées. L’université, c’est mieux, mais à vrai dire, ça ne prépare pas réellement à affronter le monde merveilleux de la production cinématographique, qui ne s’intéresse guère aux préoccupations artistiques d’un jeune vétéran. C’est donc par le biais d’un obscur thriller horrifique, Sugar Cookies (1973), qu’Oliver Stone met un pied dans la place en décrochant un poste de producteur associé. La chose, d’ailleurs coécrite par Lloyd Kaufman, futur boss de la firme Troma, narre le meurtre d’une starlette lesbienne par un réalisateur sadique. Sur le tournage, Stone fait la connaissance de Jeffrey Kapelman et Garrard Glenn. Ils se montrent particulièrement intéressés par le mauvais rêve de Stone, qui a désormais pris l’apparence d’un traitement de quelques pages. Les deux hommes héritent de la production du projet désormais intitulé Queen of evil. Ensuite, il faut démêler les fils d’un financement pour le moins opaque. 3, 2, 1… C’est parti ! 

MAUVAIS RÊVE 

De novembre 71 à septembre 72, Kapelman, Glenn et Stone travaillent d’arrache-pied afin de réunir le maximum de fonds nécessaires à mener à bien l’entreprise. Face aux investisseurs privés, leur argument est simple. Même s’il n’est pas réussi, Seizure ne peut pas perdre d’argent étant donné la prospérité du marché du film d’horreur à petit budget. À ce point du récit, Seizure est encore un film d’horreur, du moins sur le papier. Pour la petite histoire, un certain Michael Thevis participe anonymement au financement. Surnommé « le Scarface du porno », Thevis détient à lui seul pas loin de la moitié du marché de la pornographie légale et illégale sur le sol américain. Propriétaire d’un label de mu [...]

Il vous reste 70 % de l'article à lire

Ce contenu éditorial est réservé aux abonnés MADMOVIES. Si vous n'êtes pas connecté, merci de cliquer sur le bouton ci-dessous et accéder à votre espace dédié.

Découvrir nos offres d'abonnement

Ajout d'un commentaire

Connexion à votre compte

Connexion à votre compte