Pourquoi mourir entre les quatre murs sordides d’une chambre d’hôpital ou, oublié de tous, au fond de son lit, recroquevillé par la peur de ce qui adviendra ? On préférerait se perdre dans la grandeur éternelle de paysages grandioses, linceuls éthérés et consolateurs, et s’offrir comme ultime sentiment d’appartenir à la beauté du monde. Mais pour vivre cela, il faut accepter que la partie est sur le point de se terminer. Sonné par la défaite, il faut savoir quitter la table de jeu sans se soucier de l’illusoire espoir de se refaire miraculeusement. Avant qu’il ne soit trop tard, Rick Deckard (Harrison Ford) quitte Los Angeles, la ville monstrueuse et délétère afin d’accompagner Rachael (Sean Young) qui vit ses derniers instants. Plus modeste et bien plus solitaire, Sol Roth (Edward G. Robinson) accepte d’être euthanasié en contemplant une dernière fois les paysages filmés d’une nature qui a disparu deux générations auparavant. Blade Runner et Soleil vert décrivent deux villes polluées, nocturnes et dévastées. Elles sont peuplées d’êtres inquiets et dépressifs qui, hormis l’instinct de survie, perdent peu à peu leur raison de vivre. Un paysage ensoleillé devient alors la consolation d’une vie meurtrie et peu exaltante.

LOINTAINE NATURE
Sol est pris en charge par le Foyer, un organisme qui accompagne médicalement ceux qui décident d’en finir avec la vie. Après avoir ingurgité un poison lent et doux, on projette au patient, sur écran géant, un court film montrant une nature immaculée et à jamais disparue. Un premier plan décrit tout le dispositif. Sol est couché au bas de l’image, qui est presque entièrement occupée par la projection. Il est minuscule à l’&ea [...]