Septième hard, le cinéma X dans la fiction
Loin de Boogie Nights, Larry Flynt ou Lovelace, le cinéma de genre pur et dur ne s’est jamais privé de flirter avec le X, mais s’est plus rarement penché sur les différents aspects de son industrie.
On le sait depuis Vendredi 13 : dans n’importe quel slasher qui se respecte, les tueurs ne supportent pas qu’on se livre à la fornication. Autant dire que le tournage d’un film X constitue pour eux une offense impardonnable doublée d’un terrain de chasse idéal pour évacuer leurs traumas d’enfance à grand renfort d’armes phalliques et tranchantes.
Témoin Porn Shoot Massacre (Corbin Timbrook, 2009), où sept jeunes filles recrutées pour tourner dans une fiction pour adultes se rendent compte qu’il s’agit en réalité d’un snuff horrifique où elles jouent les victimes pour de vrai, puisqu’un sadique dont le visage est dissimulé par un string pour homme a été engagé pour les dessouder. Aussi généreux en nudité que timide en gore, le film est affreusement mauvais, mais très amusant lorsqu’il s’attarde sur les coulisses du tournage, ou qu’un nain intervient lors d’une scène de triolisme dans laquelle une fessée le fait couiner de bonheur.
SLASH PORN
Sur le plateau de One-Eyed Monster (Adam Fields, 2008), ce n’est plus un tueur qui sévit, mais une intelligence extraterrestre dont la mission consiste à inséminer toutes les femmes qu’elle croise afin de repeupler la Terre. Pour ce faire, elle infecte le phallus légendaire du hardeur Ron Jeremy (dans son propre rôle). Son membre, devenu indépendant, écume le tournage dont l’équipe est piégée par une tempête de neige dans un chalet au beau milieu des montagnes californiennes.
Fréquenté par d’autres stars du X (Veronica Hart, Carmen Hart), Amber Benson (Tara dans Buffy contre les vampires) et cette vieille ganache de Charles Napier, le film doit sa relative réussite au fait qu’il multiplie les hommages bien sentis (Alien, The Thing, Les Dents de la mer) et reste très premier degré alors qu’il nous montre un zizi doué d’une vie propre se promener pour envahir tous les orifices disponibles. Une comédie étonnamment sage malgré ses faux airs de production Troma, mais qui s’avère néanmoins assez sympathique.
Écrit et produit (avec le ténor du bis Jim Wynorski) par Lukas Kendall (ancien boss du label de B.O. Film Score Monthly) et réalisé par le vétéran de New York – unité spéciale Robert Nathan, Lucky Bastard (2014) s’intéresse à un fan de X invité à jouer dans une vidéo avec sa porn star préférée (la scream queen Betsy Rue, déjà vue dans le remake de Meurtres à la St-Valentin). Ce qu’il ignore, c’est qu’il a été choisi pour être ridiculisé, le site auquel sont destinées les images s’étant fait une spécialité de montrer des amateurs foirer leurs performances sexuelles.
Le jeune homme se retrouve d’autant plus humilié qu’il a un véritable crush pour sa partenaire. Déterminé à ce que personne ne puisse être témoin de ses troubles érectiles, il décide de massacrer toute l’équipe. Médiocre sur la forme (du found footage capté à travers les caméras intradiégétiques), le film se plaît à décrire de manière très factuelle les conditions de tournage d’une production X avant de bifurquer vers le slasher et sort du lot grâce à une interprétation sans faille.
Porn Shoot Massacre de Corbin Timbrook.
Mais c’est définitivement Ti West qui aura su donner sa lettre de noblesse au sous-genre du « slasher on a porno shoot » avec X (2022), qu’il est aujourd’hui intéressant de redécouvrir après avoir vu sa préquelle Pearl, disponible en vidéo le 16 août (cf. critique à lire ici).
C’est justement chez Pearl et son mari Howard que s’installent les membres de l’équipe de tournage d’un porno ayant pour titre Les Filles du fermier. Bien sûr, ils se gardent bien de révéler aux propriétaires des lieux de quel type de film il s’agit. L’action se déroulant à la fin des années 1970, Pearl est désormais une vieille dame, mais elle est encore plus détraquée qu’avant et totalement nymphomane, ce qui la pousse à draguer Maxine, la star du film dans le film.
La grande idée de X est sans nul doute d’avoir confié le rôle de Pearl et de Maxine à la même actrice (la géniale Mia Goth, actuellement visible dans l’excellent Infinity Pool du fiston Cronenberg) afin d’appuyer le fait que la première voit en la seconde un double d’elle-même plus jeune et surtout plus accomplie et libérée.
Avec ce slasher rural où s’illustre également Jenna Ortega, West rend le plus bel hommage qui soit à Tobe Hooper (la ferme habitée par des sadiques, la victime dévorée par un alligator) tout en entamant une trilogie qui fera date (et dont la conclusion, MaXXXine, qui se déroulera dans le L.A. underground des 80’s, sortira dans les mois qui viennent).
Liz et Helen de Riccardo Freda.
SEXY GIALLI
On le sait, le slasher ne serait rien sans le thriller transalpin. Giallo de machination dans la lignée de ceux d’Umberto Lenzi, Liz et Helen (1969) est pour Riccardo Freda l’occasion de se frotter au genre avec son savoir-faire habituel.
Un homme d’affaires (Klaus Kinski) hérite de la fortune de son épouse infidèle après le décès de celle-ci dans l’explosion de sa voiture. Suspecté, il quitte Rome pour Londres où il fait la connaissance d’une belle inconnue qui l’emmène à une soirée hippie où il assiste à la projection d’un film érotique lesbien. La vedette de ce dernier est une femme masquée qui ressemble à s’y méprendre à sa défunte épouse. Dès lors, il se lance à la recherche de celle qu’on surnomme « la Comtesse », persuadé qu’Helen est encore en vie.
Entre gothique et Swinging London, Freda livre un suspense hitchcockien bien troussé sur un chouette thème musical de Nora Orlandi. Le film ressortira en France en 1976 sous le titre Chaleur et jouissance, caviardé de plusieurs scènes X avec Alice Arno, la « comtesse perverse » de Jess Franco.
Grand fan de giallo – au point d’en avoir réalisé un en le faisant passer pour un thriller érotique avec Pulsions, Brian De Palma en remet une couche avec Body Double (1984). Il en profite pour faire un tour dans le milieu du porno US de l’époque en compagnie de son héros Jake Scully (Craig Wasson), un acteur au chômage qui mate tous les soirs sa voisine d’en face (Deborah Shelton) en train de se masturber. Après avoir été témoin du meurtre de la malheureuse, il va mener sa propre enquête lors de laquelle il fera la connaissance de Holly Body (Melanie Griffith), une starlette du X à qui il se présente comme producteur.
Ce qui nous vaut une scène clipesque en diable où il déambule en sa compagnie dans un décor d’orgie décadente alors que retentit Relax de Frankie Goes to Hollywood. Même si c’est une actrice porno qui fournit au héros une partie de la clef du mystère, le milieu du X reste périphérique au récit, mais De Palma dresse avec Holly un joli portrait : celui d’une comédienne [...]
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