PRIMAL de Genndy Tartakovsky

Quand le créateur de Samouraï Jack se lance dans une série préhistorique pleine d’action, de sang et de dinosaures féroces, qui plus est animée par un studio français, on a forcément envie d'en savoir plus. Primal saison 1 est à découvrir depuis le 8 octobre sur Adult Swim France.
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Paris, le 5 septembre 2019. C’est dans le XVIIIe arrondissement de la capitale, non loin de Montmartre, que se fabrique la nouvelle série du créateur de Samouraï Jack. Dans un immeuble discret coincé entre un poissonnier et un primeur se cache une cour intérieure où s’empilent les ateliers à l’ancienne, entre confection de robes de mariée et cabinets d’architecte. C’est là que Oussama Bouacheria, Julien Chheng et Ulysse Malassagne, trois trentenaires issus de l’école des Gobelins, ont établi La Cachette, leur studio spécialisé dans l’animation 2D traditionnelle. Les animateurs dessinent donc chaque image à la main, la tablette graphique ayant simplement remplacé la feuille de papier et la table lumineuse. « À l’école, on nous disait que la 2D et l’animation traditionnelle étaient en train de mourir. Mais nous sommes têtus et amoureux du medium » avoue Oussama Bouacheria. Dans le bureau des trois associés, on remarque au mur une affiche de Waterworld et un volume de Dragon Ball qui traîne sur une table. Il y a pires références.
La Cachette a notamment travaillé sur l’épisode Sucker of Souls de Love, Death & Robots, l’anthologie animée produite par David Fincher et Tim Miller, ainsi que sur le long Mune, le gardien de la lune. Producteurs exécutifs de l’animation sur Primal, Bouacheria, Chheng et Malassagne supervisent désormais une équipe d’une quarantaine de personnes répartie dans plusieurs petits bureaux : layout, décor, animation, compositing… L’équipe livre des plans finalisés auxquels ils ne manquent plus que la bande-son. C’est le procédé développé par le studio qui a séduit Genndy Tartakovsky : les réalisateurs externes sont invités à indiquer leurs corrections par le biais du dessin plutôt que dans de longs e-mails. À chaque étape, le réalisateur ouvre le fichier informatique du plan et rentre ses corrections en rouge sur son calque. « Le fait de dessiner dans les fichiers fait que les distances sont effacées. Nous sommes des dessinateurs de métier et Genndy aussi » rappelle Oussama. « On gagne donc en temps et en précision. Et le décalage horaire nous avantage : quand on dort, il corrige ! » 



C’est en janvier 2018 qu’a débuté le travail sur le pilote de Primal. « C’est exactement le genre de choses qu’on voulait faire » reconnaît Ulysse. « On s’attendait à un épisode de série comme les autres, mais au lieu de ça, on a vu un drame préhistorique sans dialogue et hyper prenant » poursuit Julien. Désormais le processus est rodé. Depuis les États-Unis, Tartakovsky envoie un « animatic story-board » de chaque épisode, pour lequel il s’enregistre en train de pitcher ce qui se passe à l’écran, avec bruitages et musique. « Un pitch de Genndy c’est une expérience incroyable ! » reconnaît Julien. « Mais ça reste assez brouillon et énergique : il y a beaucoup de dessins et d’annotations, mais il y a aussi beaucoup à faire derrière. » Ensuite, charge à La Cachette de partir de ces croquis très détaillés pour mettre en place chaque plan et remplacer les personnages par leur modèle définitif. C’est l’étape du layout. « C’est lors de cette étape qu’on peut être force de proposition » explique Oussama. « Il y a des trucs que Genndy oublie ou qu’il ne précise pas. On essaye d’apporter une petite plus-value à certains plans. Il reçoit et il dit « cool » ou « pas cool » ! Au fur et à mesure des épisodes, les retours se sont faits moins conséquents. L’équipe s’est habituée à son style. » Puis c’est l’étape de l’animation, avec les mêmes aller-retour. Après une première année de travail à distance, Genndy Tartakovsky et le directeur artistique Scott Wills ont fait le déplacement jusqu’à Paris pour rencontrer l’équipe en janvier 2019. « Ils ne connaissaient pas notre studio » raconte Julien. « Ils sont habitués à de gros open space, des bureaux à l’américaine. Là, ils ont vraiment senti cet esprit atelier, petite confection artisanale. (rires) Ça leur a bien plu. Et puis, ils ont pu expérimenter la vie parisienne. » 
Le jour de notre visite, les animateurs travaillent sur l’animation de l’épisode 8 (sur les 10 que compte la première saison), tandis que l’équipe des layouts se penche déjà sur l’épisode 9. « Nous avons tous fait un pas vers l’autre pour trouver un juste milieu » explique Julien. « En termes de style, on amène beaucoup de choses, et Genndy a apporté toute une énergie dans le timing et le découpage. Pour un animateur, véhiculer de l’émotion sans dialogue, c’est le challenge ultime. Par exemple, pour illustrer la relation entre Fang l’homme préhistorique et Spear le dinosaure, nous avons étudié le comportement des animaux de compagnie : comment ils attendent leurs maîtres, comment ils montrent s’ils sont tristes ou contents… Il fallait trouver des mouvements physiques pour transmettre ce genre d’émotions. » Mais Oussama précise : « Sauf que ce n’est pas un chien, mais un dinosaure. Il fallait trouver le caractère de Fang. ».
Alors que le travail se poursuit sur les derniers épisodes de Primal et qu’une éventuelle participation à la saison 2 de Love, Death & Robots est à l’étude, le t [...]

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