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Preview : Simetierre
Simetierre
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Un minibus nous emmène, en compagnie d’une quinzaine de journalistes venus d’un tas de pays différents, dans une zone rurale de l’ouest de Montréal, dédiée à l’élevage des chevaux. Ce ne sont pourtant pas les secrets de l’équitation canadienne qui nous intéressent le plus : nous sommes surtout impatients de visiter les extérieurs de Simetierre (Pet Sematary en VO). D’abord, le long-métrage, annoncé dans nos salles pour le 10 avril prochain, sera sans conteste l’un des événements de l’année en matière de cinéma d’horreur. Et en outre, bien qu’il ait sans doute été mis en chantier grâce au succès inattendu de la première partie de Ça, autre adaptation d’un ouvrage de Stephen King, ce film-ci suscite une curiosité toute particulière. Le roman Simetierre jouit en effet d’une aura singulière, qui en fait presque un objet maudit sur lequel les cinéastes hésitent à poser les mains. Rappel de l’histoire pour ceux qui ne l’auraient pas encore lu.
UN CREED DANS LA NUIT
Nommé médecin dans une université, Louis Creed s’installe dans une belle maison campagnarde avec sa femme Rachel et leurs deux enfants, la fillette Ellie et le nourrisson Gage. La famille fait rapidement la connaissance des époux Crandall, un couple de retraités habitant de l’autre côté de la route. Le mari, Jud Crandall, fait découvrir aux Creed une curiosité locale : les enfants du coin ont pour tradition d’enterrer leurs bêtes domestiques dans un sanctuaire naïf qu’ils ont baptisé « Simetierre des animaux », d’où la puérile faute d’orthographe du titre. Bizarrement, Louis se met à faire des rêves saisissants où le fantôme de Victor Pascow, un étudiant mort dans ses bras à l’infirmerie de la fac, le met en garde contre les sortilèges de l’endroit. Rien de bien grave, mais c’était compter sans le gros point noir de ce coin idyllique : la route séparant la maison des Creed de celle des Crandall est sans cesse parcourue par des poids lourds roulant à vive allure. Church, le chat adoré d’Ellie, est ainsi écrasé par un camion. C’est alors que Jud fait une étrange révélation à Louis. Derrière le Simetierre des animaux, s’en trouve un autre, perdu dans la forêt immémoriale des Amérindiens, et cette antique nécropole recèle un pouvoir magique. Si vous y enterrez votre compagnon à quatre pattes, ce dernier reviendra miraculeusement à la vie…
Comme on le voit, le roman force le lecteur à regarder en face toutes ces histoires de maladie, de funérailles, d’embaumement des corps, sur lesquelles la plupart d’entre nous voudraient fermer les yeux, en en faisant le moteur d’un récit fantastique et horrifique. Car Stephen King ne cesse de répéter cet aphorisme : une fois que vous avez rencontré la mort, elle restera accrochée comme la merde à vos basques… Ce thème dérangeant explique peut-être la longue genèse du film. Dès 2010, le producteur Lorenzo di Bonaventura planche sur le projet et commande un scénario à Matt Greenberg, qui avait écrit pour lui une autre adaptation de King, Chambre 1408. À l’époque, on murmure que Guillermo del Toro serait intéressé, mais c’est en 2013 que les choses prennent un tour concret, quand des pourparlers sont entamés avec Juan Carlos Fresnadillo (28 semaines plus tard) pour assurer la réalisation. Cachottier, le nabab di Bonaventura nous a affirmé n’avoir aucun souvenir de cet épisode. En tout cas, à l’automne 2017, il prend l’étonnante décision de recruter deux réalisateurs venus de l’horreur indépendante, Kevin Kölsch et Dennis Widmyer (Starry Eyes), pour porter à l’écran un scénario retravaillé entretemps par David Kajganich (le Suspiria de Guadagnino) et Jeff Buhler (Midnight Meat Train). Quant aux rôles de Louis Creed et Jud Crandall, ils sont respectivement attribués au débonnaire Jason Clarke et au vétéran John Lithgow, ancien favori de Brian De Palma.
FIDÈLES AU TEXTE
Reste à voir quelle direction prendra le film, et c’est ce que nous avons tenté de découvrir en interrogeant les talents sur le tournage, notamment à propos des sources retenues. Il faut en effet se souvenir que le roman a déjà été adapté au cinéma en 1989, avec un long-métrage également intitulé Simetierre/Pet Sematary et réalisé par Mary Lambert. Aujourd’hui, cette première tentative paraît datée et un brin télévisuelle, mais les maîtres d’oeuvre de la version 2019 sont un peu gênés aux entournures pour en parler. Et pour cause : le film de Mary Lambert marquait la première fois où Stephen King signait le scénario de l’adaptation d’un de ses bouquins, et il ne s’agirait pas de vexer le maître de l’horreur littéraire, dont les adoubements par voie de tweet sont âprement recherchés par les gens du métier. Après quelques tergiversations, Lorenzo di Bonaventura a cependant craché le morceau, nous avouant son peu d’estime pour le boulot de ses prédécesseurs. Les coréalisateurs Kölsch & Widmyer, eux, sont plus bienveillants envers la version d’il y a 30 ans, et ils nous ont d’ailleurs balancé un petit scoop à son sujet. Ils ont eu entre les mains le premier jet du script rédigé par King en 1989, dont l’ambiance serait assez « out there », c’est-à-dire « autre ». Cela signifierait-il que le travail du romancier a ensuite été policé par d’autres auteurs, non crédités au générique ? C’est à creuser.
Cependant, tous les participants au Simetierre copyright 2019 se sont accordés pour dire que l’idée globale était de revenir au livre original, tout en y apportant certains ajustements. Mais sur ces modifications, difficile d’en apprendre plus. Seul John Lithgow nous a fait deux révélations majeures. D’abord, Norma Crandall, la femme du vieux Jud, est de la partie, alors que le personnage avait été biffé du film de 1989. Et surtout, Jud serait pourvu de tout un passé traumatique absent du roman. Dans ce dernier, le retraité des chemins de fer se contentait en effet de raconter avoir été témoin de la résurrection d’une poignée d’animaux domestiques… entre autres mammifères. Mais lui inventer une « backstory » semble être une idée diablement intéressante pour revisiter l’ouvrage de Stephen King. Voilà à peu près toutes les infos que nous avons glanées. En tout cas, nous avons pu visiter le décor du « Simetierre des animaux », et nous pouvons vous certifier une chose : jusqu’à la plus petite croix en boîte de conserve martelée, et jusqu’au dernier bocal à poisson rouge, il est en tous points fidèle à la description donnée par le bouquin.
INTERVIEW KEVIN KÖLSCH & DENNIS WIDMYER RÉALISATEURS
Sortis de l’anonymat par leur remarquable Starry Eyes, Kevin Kölsch et Dennis Widmyer se retrouvent aux manettes de Simetierre. Rencontre avec des coréalisateurs qui affichent leur intention de déployer les harmoniques les plus noires du roman original.
Alors qu’une équipe nombreuse s’affaire dans la forêt québécoise, Kevin Kölsch et Dennis Widmyer arrivent pour répondre à nos questions. La situation ne manque pas de sel, puisque les deux coréalisateurs ont été remarqués pour l’excellent Starry Eyes (2014), film à petit budget qui s’attaquait précisément à l’industrie hollywoodienne. L’héroïne était en effet une aspirante actrice qui, prête à tout pour devenir star, se retrouvait en cheville avec des producteurs louches, liés à une étrange secte… « Nous ne sommes pas des perdreaux de l’année » admet Kölsch. « À la différence de certains de nos amis qui ont réalisé un long-métrage très jeunes, nous avons passé 20 ans à faire nos courts-métrages et nos petits films indépendants. Arrivés à un certain âge, nous avons donc pensé que nous ne travaillerions jamais dans l’industrie, et nous avons mis nos frustrations dans Starry Eyes. Mais le plus drôle, c’est que ce film nous a enfin valu des propositions de Hollywood ! » Widmyer rebondit : « Si vous créez quelque chose d’exact et d’honnête, les gens seront forcés de l’accepter, même s’ils sont du bon côté de la barrière. Ainsi, même ceux dont nous faisions la satire ont bien répondu à Starry Eyes, car ils comprenaient que cela venait des tripes. Comme le disait Kevin, à travers un personnage d’actrice, nous parlions de tous les artistes qui se démènent pour réussir. À cet égard, c’est un film très subversif, et je crois que cela fonctionne sur les spectateurs. ».
De fait, les deux compères sont bombardés à la tête de Simetierre, qui n’est rien moins qu’une production Paramount. Sans doute faut-il y voir une conséquence du succès inattendu du premier volet de Ça, qui a remis en lumière les adaptations de Stephen King et, plus largement, un certain type d’horreur. Dennis Widmyer le reconnaît volontiers : « Oui, cela a clairement rouvert des portes. Les gens du business se sont dit : « Hé, nous devrions jeter un oeil aux livres de King, et les traiter de la même manière que les Muschietti ont traité Ça. ». Nous leur devons donc une fière chandelle, c’est sûr. ». Simetierre constitue cependant un cas très particulier, étant l’un des romans les plus sombres de l’auteur. « Eh bien, c’est celui-là qu’on nous a chargés de raconter à l’écran, mais nous adorons ça ! » rigole Widmyer. « En fait, j’ai commencé à lire Stephen King vers l’âge de onze ou douze ans, mais j’ai évité Simetierre pendant longtemps. Je me souviens en effet que le dos de la couverture annonçait : « Le roman le plus terrifiant jamais écrit. ». En plus, j’avais un chat à l’époque ! Et quand je l’ai enfin lu, je l’ai trouvé différent des autres livres de King. Quand vous regardez son travail, vous vous rendez compte qu’il est en fait très sentimental. Par exemple, à la fin de Shining, Hallorann se marie avec Wendy – les gens l’oublient car ce n’est pas dans le film. Simetierre n’est pas comme ça : c’est le bouquin où le héros ne comprend jamais vraiment ce qui se passe. Son arc narratif est comme une spirale sans fin, et sa famille sombre lentement dans la folie. Quand vous lisez un truc pareil à un jeune âge, cela laisse une trace indélébile. Car Simetierre paraît plus dangereux que les autres livres de Stephen King, et il est aussi très autobiographique. Heureusement, nous avons reçu un grand soutien des producteurs, qui ont compris qu’on ne pouvait pas déconner avec l’essence du roman. Notre film fonctionne ainsi sur deux niveaux : l’aspect surnaturel va effrayer les ados, et les parents auront matière à réflexion, à cause de ce qui arrive aux enfants. »
LE RETOUR DE ZELDA
Reste à savoir si cet ambitieux projet puisera surtout dans le roman original ou dans le long-métrage réalisé en 1989 par Mary Lambert, dont le scénario avait été écrit par Stephen King lui-même. Widmyer nous indique avoir suivi la première option, même si la précédente adaptation n’est pas dédaignée non plus : « Nous avons pu consulter le premier jet du script de King, qui est assez barré. Et de manière générale, nous sommes très r [...]
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shadowfax60
le 11/02/2019 à 17:31Une hérésie... comment King peut laisser passer une telle trahison à son oeuvre... Avec un gros chèque ? Je retourne me mater en boucle le Lambert. :)