Preview : Furie d'Olivier Abbou

Dans son prochain long-métrage, l’auteur de Territoires se saisit d’un banal fait divers pour faire monter une tension psychologique jusqu’à l’ébullition. Voici nos premières impressions, en compagnie d’un réalisateur qui était alors en train de bosser d’arrache-pied sur la postproduction.

Quand on pense aux meilleurs réalisateurs français de genre, le nom d’Olivier Abbou ne vient pas tout de suite à l’esprit. Pourtant, le mec creuse son sillon avec une constance remarquable. Il y a quelques années, il nous gratifiait de Territoires, dont la distribution en salles a été scandaleusement limitée, mais que nous avions ardemment défendu en ces pages. Puis il a pris sa revanche avec le succès-surprise (un million de téléspectateurs sur Arte) de la mini-série Maroni, les fantômes du fleuve, qui, comme il le dit, « commence par une classique enquête sur un meurtre, et finit par glisser dans la mystique vaudou ». Et quand Abbou nous invite à visionner une version provisoire de son nouveau long-métrage, intitulé Furie, notre curiosité est forcément titillée.



RÉACTEUR À PULSIONS
Par une belle soirée d’été, un couple avec enfant campe sur une plage déserte. Tout serait parfait si, une fois le petit couché, l’homme et la femme ne se lançaient pas dans une étreinte sexuelle qui n’a guère l’air satisfaisante. On se dit que la famille va être harcelée par des inconnus, comme dans Eden Lake par exemple, mais pas du tout. En effet, Furie prend le principe du home invasion encore plus au pied de la lettre qu’on ne le croyait. « L’histoire part d’un fait divers réel qui a eu lieu en 2012 ou 13, à Port Leucate » nous informe le réalisateur. « Comme dans le film, un couple rentrait de vacances en camping-car, après avoir laissé sa maison à des amis. Or, ces derniers avaient changé les serrures, et les propriétaires ne pouvaient donc plus entrer chez eux. Il s’en est suivi tout un parcours administratif kafkaïen, à cause du papier très ambigu qu’ils avaient signé, stipulant que les hôtes devaient payer les charges courantes en échange du prêt de la maison. Ce fameux papier a ralenti toute la procédure, et a repoussé le jugement pendant la trêve hivernale. Ainsi, le couple était de toute façon à la rue au moins jusqu’au printemps suivant. Bref, nous sommes ainsi partis d’une situation très simple et concrète, afin d’observer un homme vacillant dans sa vie, son couple, ses valeurs, au point d’être sollicité par quelque chose de très primaire : une fois que toutes les autres solutions sont épuisées, est-ce que j’utilise ou non la violence pour régler le problème ? En effet, la sauvagerie en l’homme est un sujet qui m’intéresse pas mal. » Cependant, le récit va sensiblement évoluer pendant l’écriture, comme nous le détaille Abbou.
« À l’origine, c’était un scénario d’Aurélien Molas, avec qui j’ai entre-temps collaboré sur ma série Maroni » nous prévient-il. « Nous avons ensuite retravaillé Furie à quatre mains, et c’est donc difficile de déterminer ce qui appartient à l’un ou à l’autre. Disons que j’ai renforcé la composante intime du script, l’histoire de couple à l’intérieur de cette affaire. Ainsi, comme vous l’avez vu, le film est devenu comme une grande parenthèse entre deux scènes de sexe. Cela jette d’ailleurs sur l’ensemble une ironie générale qui me plaît beaucoup. Tout ça pour ça, quoi : ce mec passe par toutes ces épreuves juste pour être capable de bien baiser sa meuf. Bref, la maison est presque un prétexte pour que le personnage puisse reconquérir son corps, sa virilité, et assumer à nouveau son histoire avec sa femme, qui n’a visiblement pas été de tout repos. » Déjà humilié par son impuissance devant la situation, le héros est en effet contraint de planter sa caravane dans un terrain de camping désert dont le gardien, Mickey, est un ancien camarade de lycée de sa femme, avec qui la belle semble avoir eu une relation trouble. Pour autant, ce branleur patenté, qui passe son temps à faire les 400 coups avec une bande de gros lourdauds, va s’avérer être un véritable personnage méphistophélique, attisant avec délectation les mauvais penchants de son nouveau locataire [...]

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