Mad in France N°325

Après avoir obtenu son diplôme de scénographie à L’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris (ENSAD), Lilith Bekmezian se tourne vers le cinéma en tant que directrice artistique et illustratrice. En à peine quinze ans de carrière, son impressionnante filmographie parle pour elle.

Quelle formation avez-vous suivie et pourquoi vous êtes-vous orientée vers le cinéma ? 

J’ai étudié la scénographie à l’ENSAD après avoir suivi un cursus littéraire. Mon diplôme de scénographe en poche, j’ai voulu prolonger mes études dans cette école riche en enseignements pluridisciplinaires avec une spécialisation en animation 3D, pour mieux comprendre l’espace en volume et en mouvement à travers des outils numériques. C’est cette dimension virtuelle complémentaire qui m’a fait choisir le cinéma plutôt que le théâtre : j’avais le sentiment que le cinéma offrait plus de possibilités créatives, tant dans la diversité des projets et des équipes que dans la conception d’espaces, d’atmosphères et d’objets. 


Vous avez très vite oeuvré sur des productions internationales et ambitieuses : le métier de concept artist implique-t-il forcément de travailler sur films au budget conséquent ? 

Au début de ma carrière, j’ai rencontré des personnes – feus Guy-Claude François et Anne Seibel – qui m’ont aidée à démarrer dans ce métier, car le cinéma fonctionne surtout en interne, par réseau… Je travaille en tant qu’illustratrice de décors et c’est un poste qui reste un « luxe » en France sur la plupart des projets de films, il est donc souvent réservé à des productions importantes où le budget permet le « confort » artistique, et pas seulement la stricte économie nécessaire à la viabilité d’un film. 



Vous concentrez-vous uniquement sur la conceptualisation des décors ? Ou vous arrive-t-il de « déborder » sur d’autres départements ? 

Je peux vous donner un exemple parlant à ce sujet. J’ai travaillé sur Au revoir là-haut, l’adaptation réussie par Albert Dupontel du roman de Pierre Lemaitre. Sur ce film, mon rôle reflète l’ensemble de ce que je peux être amenée à créer sur un long métrage. D’abord, la conception des décors : à partir de la lecture du scénario, on cherche à donner à chaque décor une identité et une harmonie esthétique en respectant les données de l’Histoire. Ce sont de petits croquis ou de grandes illustrations. Lorsque les dessins ont été validés par le réalisateur et le chef décorateur, je passe aux plans de construction des décors. Une partie plus pratique et plus technique. Enfin, j’ai conçu les « Académies » qu’Édouard, l’un des personnages principaux, dessine. Là, c’est de la création d’accessoires de jeu. Dessiner tous ces monuments aux morts exigeait encore une autre démarche artistique : il s’agissait de se couler dans un style de dessin spécifique à cette époque, assez impersonnel, tout en inventant des monuments. 


Vous avez plusieurs films historiques à votre actif : Marie Antoinette, L’Instinct de mort/L’Ennemi public n°1, Or noir… Le travail de recherches historiques vous passionne-t-il autant que la pure invention artistique ? Quels en sont les contraintes et les avantages ? 

La recherche historique peut être faite par une documentaliste ou par les dessinateurs eux-mêmes. Dans tous les cas, je fais toujours moi-même une recherche en complément de la banque d’images pour « entrer » dans l’atmosphère d’une période. Je le fais en pensant au scénario et aux personnages avec une démarche ciblée, un regard plus affûté, cela met l’esprit dans une prédisposition créative et lui offre des ressources iconographiques sans lesquelles l& [...]

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