Le canard aux prunes
Howard, une nouvelle race de héros
Août 86. Dépression généralisée chez Universal, quelques jours après la sortie de Howard, une nouvelle race de héros, la dernière production de George Lucas. Avec un premier weekend à 10 millions de dollars, le cauchemar d’un flop historique devient réalité. Au total, entre l’Amérique du Nord et l’étranger, le film picore 37,9 millions. À peine plus que son budget. Mais il a coûté autant en frais de sortie. Gravement dans le rouge, Howard… plonge le studio dans la crise. Ses deux patrons, le responsable de la production Frank Price et le président Sid Sheinberg se refilent la patate chaude. Qui a donc pris la décision de s’aventurer dans cette galère ? Les deux hommes s’accusent avec une telle vigueur qu’ils en seraient venus aux mains. Frank Price prendra la porte peu après. Quant à Sheinberg il aurait validé le script sans même l’avoir lu, accablé par le regret d’avoir refusé à George Lucas le financement de La Guerre des étoiles et inquiet de le voir conter fleurette à un concurrent.
George Lucas paie aussi les pots cassés. Pas d’autre choix pour lui que de vendre, à bas prix, la branche animation du studio d’effets spéciaux Industrial Light and Magic à son ami Steve Jobs. Département qui deviendra… Pixar.
GUEST STAR
Près de trente ans après les « événements », que reste-t-il de Howard, une nouvelle race de héros ? Contre toute attente, le vilain petit canard de Hollywood revient peu à peu en grâce. Merci aux Gardiens de la galaxie d’y avoir contribué, en se terminant sur l’image du canard, débraillé, une coupe de tord-boyaux à la « main ». Il n’en faut pas davantage pour lancer la rumeur d’un Howard présent dans Les Gardiens de la galaxie 2. « Howard est arrivé dans le film de manière fortuite » explique James Gunn, son réalisateur et scénariste. « Au départ, il était question que le Baby Groot en pot l’achève sur une petite danse. Pas satisfaisant. Nous avons alors passé en revue plusieurs idées tournant autour de Cosmo, le chien de l’espace. Sans que je m’y attende, lors d’une conversation, Fred Raskin, le monteur, l’a proposé : « Collons Howard ici ! Et si Benicio del Toro se retournait et le voyait, assis là ? ». J’ai écrit une ligne de dialogue que j’ai ensuite communiquée à Kevin Feige, de Marvel Studios. Il n’a pas pu s’arrêter de rire. Dès que ces quelques secondes revenaient sur le tapis, il disait : « Putain, nous sommes cinglés ! ». »
Prise au dépourvu, la Marvel n’en réagit pas moins en republiant, dès janvier 2015, le premier volume de Howard the Duck, scénarisé par Chip Zdarsky et dessiné par Joe Quinones. Pas l’original, cependant…
DANS UN ÉTANG
Décédé en 2008 à l’âge de 60 ans, Steve Gerber est le « père » de Howard. Celui qui, trimant en 1973 sur le comic-book L’Homme-chose, imagine un canard en provenance d’un étang en écoutant un morceau de salsa diffusé par les enceintes de la sono du voisin. Étrange idée, la BD en question appartenant au genre horrifique. « Chez la Marvel, tout le monde n’a pas aimé » témoigne Steve Gerber. « Certains n’ont pas apprécié le mélange des genres. On m’a alors intimé l’ordre de me débarrasser du canard dès l’épisode suivant. Ce que j’ai fait. À ma grande surprise, les lecteurs se sont mobilisés en faveur de son retour. »
Piquée au vif, la Marvel autorise donc le scénariste et son dessinateur, Val Mayerik, à ressusciter le palmipède, toujours dans L’Homme-chose. Le succès est si grand qu’il connaît bientôt les honneurs d’albums à son nom. Belle promotion au bénéfice de ce héros anticonformiste, qui est à Donald Duck ce que le libidineux Fritz the Cat est à Félix le Chat : un reflet grimaçant, une version politiquement incorrecte. Sourcilleux, protecteur vis-à-vis de ses icônes, Disney prévient d’ailleurs la Marvel qu’Howard ne devra pas trop ressembler à son Donald, imposant même par contrat des critères inflexible [...]
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