LA PLANÈTE DES SINGES : SUPRÉMATIE de Matt Reeves
La Planète des singes : suprématie
Il suffit d’entendre les percussions primales et les cornes de brume qui accompagnent le logo de la 20th Century Fox pour saisir l’audace de Matt Reeves. Si le cinéaste doit gérer un budget colossal, des effets visuels miraculeux (nous y reviendrons) et un tournage en extérieurs aussi ambitieux qu’exténuant, sa démarche minimaliste risque de prendre bien des spectateurs à revers. Dans l’entretien qu’il nous donnait dans le numéro 308, Reeves insistait sur son obsession du point de vue, notion cinématographique essentielle bien souvent écartelée par l’industrie hollywoodienne moderne. L’ouverture de La Planète des singes : suprématie est à ce titre passionnante, puisqu’elle renverse le point de vue du premier plan de L’Affrontement. Le précédent opus s’ouvrait sur le regard de César sur le point de mener une chasse pour nourrir son peuple. Suprématie démarre du côté des humains, qui traquent cette fois-ci les singes eux-mêmes. En dépit de la violence et de l’évidente déloyauté de ces soldats, le réalisateur choisit de rester près d’eux durant toute la première moitié de la séquence, en prenant le temps de capter les doutes et les peurs de certains fantassins. Lorsque l’assaut gronde enfin, avec une brutalité rare, Reeves passe à un point de vue extérieur, pour ne pas dire divin. Surplombant le champ de bataille, où fusent les tirs de mitrailleuses et les corps transpercés, la caméra décide au bout d’une minute de s’accrocher à un singe, chevauchant à travers les bois en quête de renforts. Nul besoin pour le cinéaste d’étirer le combat sur une bobine entière, comme il est aujourd’hui de coutume dans le domaine des blockbusters estivaux. Construite en trois temps et en trois perspectives, son ouverture pose toutes les problématiques du récit avec le bon ton, et dans le bon ordre : le désespoir des hommes qui les pousse aux pires ignominies, l’ironie tragique de ce carnage d’où personne ne sortira gagnant, et enfin la survie difficile des singes, qui n’ont [...]
Il vous reste 70 % de l'article à lire
Ce contenu éditorial est réservé aux abonnés MADMOVIES. Si vous n'êtes pas connecté, merci de cliquer sur le bouton ci-dessous et accéder à votre espace dédié.
Découvrir nos offres d'abonnement