John Leguizamo : « Je ne suis pas un amateur du gore pour le gore »

Dans Violent Night comme dans l’entièreté de sa filmographie pléthorique, John Leguizamo ne cesse de démontrer qu’il n’y a pas de seconds rôles ou de rôles mineurs, uniquement des terrains de jeu aux possibilités infinies. Des années de pratique sur les planches peuvent ainsi propulser une figure archétypale comme « Benny Blanco, l’homme du Bronx » dans L’Impasse au firmament des créations légendaires, pour peu que la personne derrière la caméra lui laisse le champ libre. 

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Aviez-vous vu les films de Tommy Wirkola avant Violent Night ?

Oui, j’avais vu Hansel & Gretel: Witch Hunters et Seven Sisters. J’aime beaucoup ce qu’il fait, j’étais ravi de travailler avec lui parce que c’est un vrai artiste. On pourrait croire que c’est un simple réalisateur de films d’action, qui se concentre surtout sur les séquences physiques, mais non, Tommy est très attaché aux personnages, ça lui tient à cœur de les développer. Et c’est quelque chose qu’on peut sentir dans ses films, y compris celui-là. J’avais lu le script, je savais ce qui se passait, mais je n’ai pas pu m’empêcher d’être ému à la fin.


Ses films ont une touche de mauvais goût très appréciable, qui a tendance à se raréfier aujourd’hui. 

C’est vrai, il arrive à dépasser les limites sans trop en faire non plus. Je ne sais pas comment il y arrive, ça vient peut-être de son regard européen sur la culture américaine, c’est sa façon à lui de la commenter.


Quel regard portez-vous sur le cinéma gore ?

C’est compliqué. J’aime le genre quand j’y vois une profondeur, un angle sensible ou réaliste, je ne suis pas un amateur du gore pour le gore. J’adore L’Exorciste, par exemple, pour son approche psychologique et le commentaire sur le catholicisme. J’ai eu la chance de travailler avec le grand George Romero, qui a fait La Nuit des morts-vivants. C’est l’un des plus grands films d’horreur de tous les temps parce que son point de vue sur le racisme et la guerre du Vietnam résonnait avec l’époque. 




Le film que vous avez tourné avec lui, Land of the Dead, parlait lui aussi de son temps avec une longueur d’avance.

Oui, il était très lucide sur la montée du fascisme, sur ces politiciens qui se retranchent derrière des postures droitières, c’était l’apogée de son discours amorcé par La Nuit des morts-vivants. C’était un plaisir de travailler avec lui, et le fait qu’il avait lui aussi des origines latinos faisait sens pour nous deux. C’était un directeur d’acteurs exceptionnel, il avait toujours des suggestions pertinentes, il nous laissait une grande liberté. J’avais l’impression de voir un maître à l'œuvre. 


Tommy Wirkola disait qu’il aimait les antagonistes de Violent Night parce qu’ils lui rappelaient les hommes de main des films des années 1980 et 1990.

Il a tout à fait raison, les scénaristes de l’époque savaient qu’ils avaient tout à gagner à développer des bad guys que vous pouviez respecter, et pas ces idiots d’aujourd’hui, ces maniaques égocentriques auxquels vous avez du mal à croire. 


Vous avez commencé votre carrière dans les années 1990 et vous étiez catalogués dans les mêmes genres de rôles, une situation que vous mentionnez plusieurs fois dans vos spectacles. Mais vous arriviez toujours à proposer quelque chose qui sortait du lot.

Je n’avais pas le choix, les seuls rôles proposés aux acteurs latino-américains à l’époque, c’était les loubards ou les domestiques, c’était comme ça que Hollywood nous voyait. J’ai saisi toutes les opportunités que je pouvais et j’ai fini par travailler avec des réalisateurs qui comprenaient ce que j’essayais de faire, et qui m’ont aidé à développer ces rôles. Même dans Extravagances (Beeban Kidron, 1995 – NDR), j’ai pu improviser. Dans L’Impasse, je suis allé encore plus loin et Brian de Palma m’a laissé toute la latitude possible – je veux dire, il a fait cinquante prises de mon entrée dans le film, alors qu’il tournait en pellicule ! Mais il se marrait à chaque fois. Il m’a donné une liberté inouïe.



John Leguizamo est l'inoubliable Benny Blanco dans L'Impasse de Brian De Palma face à Al Pacino et Luis Guzmán.


La façon dont vous racontez votre scène de confrontation avec Al Pacino, dans votre spectacle Ghetto Klown, est particulièrement savoureuse, ça donne envie de revoir L’Impasse

Merci beaucoup, le spectacle Ghetto Klown a été compliqué à mettre en œuvre, personne n’avait vraiment raconté son histoire à Hollywood de cette façon, il a fallu trouver le paradigme approprié pour le faire. C’est l’aboutissement de toutes les techniques que j’ai accumulées au fil des années, sur les planches, que ce soit pour les entrées et sorties de scène ou pour l’écriture. 


Vous êtes plutôt adepte de l’improvisation que de ce qu’on appelle le method acting, la méthode chère à l’Actors Studio…

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