Interview : Adrian Grunberg réalisateur

Assistant réalisateur et réalisateur de seconde équipe de renom, Adrian Grunberg a contribué à Traffic de Steven Soderbergh, Man on Fire de Tony Scott, Sense8 des Wachowski ou encore Apocalypto de Mel Gibson. Il est fort probable que ce dernier, bad guy en chef dans Expendables 3, ait soufflé à Sly le nom du réalisateur, dont l’unique fait d’armes en solo avant Rambo: Last Blood était le direct-to-video gibsonien Kill the Gringo…
Array

Pouvez-vous nous parler de votre première rencontre avec Sylvester Stallone ?

Impossible d’oublier sa première rencontre avec Sly ! C’était dans sa maison ; j’avais déjà lu la première version du script qu’on m’avait envoyée quelques jours avant. Notre réunion a été passionnante, elle a duré une heure trente environ. Nous avons échangé des idées, parlé de la tonalité du long-métrage. De cette version du script jusqu’au film que vous avez pu voir en salles, les choses ont beaucoup changé. Nous avons déjà commencé à modifier des choses dès le premier jour. Sly est avant tout un écrivain, et il écrit absolument tous les jours. Nous parlions de certaines choses entre deux prises, et le lendemain il nous fournissait de nouvelles pages.


Le script a donc évolué quotidiennement pendant le tournage ?

Oui ! (rires)


Il y a un aspect intéressant dans ce nouvel opus. Rambo est connu pour être un personnage très silencieux. Le bavard, c’est généralement Rocky. Mais dans Last Blood, Rambo n’arrête pas de parler, et exprime ses frustrations à voix haute.

Absolument. C’était un choix très conscient de notre part. Nous en avons discuté très tôt. L’idée était de changer certains acquis de la série, pour mettre en évidence l’évolution du personnage. Il fallait trouver le sens de cette séquelle. Nous retrouvons Rambo dans un endroit très différent, à une période de sa vie très spécifique. Ce contexte ouvrait de nombreuses possibilités et nous permettait de souligner son humanité. On pouvait explorer des facettes qu’on n’avait jamais vues jusqu’alors chez le personnage. Il s’autorise certaines choses : c’est la première fois qu’on le voit sourire, par exemple. Il est presque heureux au début du film, même si ça change rapidement. Le personnage est donc plus ouvert, et parle davantage.


On sent bien que le personnage appartient à une époque différente. Il essaie de s’adapter à ce monde, il prend des antidépresseurs, il essaie de fuir ou de contenir ses traumatismes, mais ça ne fonctionne pas. C’est presque l’époque qui le rejette.

C’est l’idée ! C’est très tangible dans le film. Ce qui est triste, c’est qu’il n’essaie pas de s’adapter. Enfin, il s’est adapté à bien des aspects. C’est toujours un solitaire, qui s’isole dans son ranch loin de la civilisation moderne, mais le contact avec le monde réel à travers les personnages de Maria et Gabriella l’a tout de même soigné. Il a une coupe de cheveux banale, il porte des jeans, il fait de l’équitation… La dernière fois qu’on l’avait vu, c’était dix ans auparavant. Il s’est passé beaucoup de choses depuis qu’il est rentré au pays. Personne ne l’a connu aussi bien que Gabriella et Maria, à part peut-être le colonel Trautman dans le film original.



Rambo représente l’histoire américaine que l’Amérique rejette. Et elle continue de le rejeter : il vit même à l’extrême frontière du Mexique.

On a repris ce détail du roman original. Il est dit dans le livre qu’il a grandi dans une ferme de l’Arizona. Dans le tout dernier plan de John Rambo, on le voyait arriver dans le ranch familial. Tout faisait sens. Pour être honnête, nous n’avons pas essayé de faire de Rambo un personnage politique. Mais oui, sa situation géographique dans ce nouveau film a un effet indéniable sur les thématiques, et la vision de la frontière est forcément connotée. C’est un sujet très brûlant dans nos vies, que ce soit pour les Américains ou pour moi qui suis mexicain.


Last Blood se déroule à moitié au Mexique et la moitié des dialogues sont en espagnol. Les vilains sont mexicains, donc il y a forcément une résonance politique assez délicate.

Je sais que le film sera forcément abordé de cette manière, mais ce n’était pas notre but. L’univers de Rambo est ancré dans la réalité, et il attire donc des questionnements contemporains. Je suis tout de même assez satisfait d’une chose : en 35 ans, la personne qui a le mieux connu Rambo, qui a réussir à lire dans son esprit et dans son coeur, est une vieille femme mexicaine. Maria donne vraiment un poids au film.


Il y a une séquence où Rambo enfonce des barbelés à bord de sa voiture pour traverser la frontière entre le Mexique et les États-Unis. Vous ne pouviez pas ne pas penser aux résonances politiques de ce plan, compte tenu du contexte actuel…

Écoutez, oui, mais on y a pensé plus tard. Je dois admettre que la raison d’être principale de cette séquence était simplement de [...]

Il vous reste 70 % de l'article à lire

Ce contenu éditorial est réservé aux abonnés MADMOVIES. Si vous n'êtes pas connecté, merci de cliquer sur le bouton ci-dessous et accéder à votre espace dédié.

Découvrir nos offres d'abonnement

Ajout d'un commentaire

Connexion à votre compte

Connexion à votre compte