Interview : Adam Stockhausen Production Designer

Cela faisait bien longtemps que la réussite d’un film n’avait pas reposé autant sur la cohérence et l’extravagance de son production design. Réussissant à imposer ses propres idées dans un tsunami de pop culture, la direction artistique de Ready Player One est l’oeuvre d’Adam Stockhausen, ex-collaborateur de Wes Craven (Scream 4, My Soul to Take) et coéquipier fidèle de Wes Anderson (Moonrise Kingdom, The Grand Budapest hotel, L’Île aux chiens), dont la première rencontre avec Steven Spielberg sur Le Pont des espions avait déjà fait des miracles.
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C’est votre seconde collaboration avec Steven Spielberg après Le Pont des espions. Est-il très différent des autres réalisateurs avec qui vous avez pu travailler ?

Il est très différent, et chaque collaboration avec lui est elle-même différente. C’est intéressant que vous parliez du Pont des espions, qui n’avait absolument rien à voir visuellement. C’était un film traditionnel, avec des décors normaux, un tournage en extérieur, un style plus classique. Il s’agissait surtout de recréer une époque qui avait existé. Dans Ready Player One, on est au contraire 30 ans dans le futur, et la moitié du film se déroule dans l’OASIS, un monde virtuel créé entièrement sur ordinateur. Ce n’est pas tourné de façon traditionnelle, puis traité en postproduction. Ce n’est pas filmé du tout, en fait, c’est animé.


Quand avez-vous commencé à travailler sur Ready Player One ?

J’ai commencé, si je me souviens bien, au début du printemps 2015. C’est donc un processus de près de trois ans. C’est long ! On est passé par plusieurs phases. Au départ, on s’est concentré sur la conceptualisation : il s’agissait de designer des idées par rapport aux différents mondes et aux différents espaces. Il a également fallu concevoir les avatars des personnages principaux. Ensuite, quand on s’est rapproché du tournage, il a fallu concevoir, construire et peindre les décors du monde réel. Après le tournage, un nouveau processus a commencé, où nous avons dû créer tous les détails du monde de l’OASIS que nous avions esquissés durant la préproduction.


Le Pont des espions mettait en scène une époque passée, mais à vrai dire, le futur de Ready Player One a lui aussi l’air usé. Ça ressemble à un film d’époque en costumes. Et ce n’est pas futuriste.

Non, ce n’est pas futuriste, et c’était notre intention première. Il y a plusieurs raisons. Déjà, il règne dans le film une influence constante de la culture des années 1980, plus particulièrement de la pop culture. Ce monde regarde donc en permanence en arrière, et il nous semblait approprié de le concevoir ainsi. D’autre part, on voulait montrer que le monde réel s’était immobilisé. Il a arrêté d’avancer. Ce monde empile ses ordures les unes sur les autres, c’est d’ailleurs pour ça que tout le monde se connecte et s’évade dans l’OASIS. Le futurisme, dans Ready Player One, vient directement de l’OASIS. C’est notre moyen d’expression, et nous ne voulons pas que le monde réel interfère avec cette vision. Ça nous a donc beaucoup aidés de ne pas proposer un univers de science-fiction typique.


Tout est affaire de contraste.

Exactement !


Spielberg avait déjà tourné plusieurs films futuristes : A.I. intelligence artificielle, Minority Report… En avez-vous parlé avec lui, ne serait-ce que pour éviter de répéter des concepts déjà expérimentés sur ces longs-métrages ?

Nous avons clairement pris en compte ces oeuvres. Il était très clair que Steven ne voulait pas refaire Minority Report. Ready Player One était un tout autre animal. Nous avons discuté très tôt des risques d’un futurisme classique, justement, d’un point de vue narratif. Ça aurait rendu le contraste moins évident. La première fois qu’on voit l’OASIS, ça devait être un choc sensoriel. Ensuite, on a parlé de toute cette dystopie et de ses besoins esthétiques. Les gens s’intéressent moins à leur santé et à leur apparence physique dans ce monde.


Un seul élément futuriste existe dans le monde réel : les lunettes de réalité virtuelle.

Oui, bien que certains casques aient une apparence un peu rétro. Steven voulait vraiment que le public comprenne que tout le monde porte ces lunettes VR. Partout où l’on regarde, on ne voit que des gens connectés à ce jeu. C’est l&agrav [...]

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