Interview :  Sayombhu Mukdeeprom, directeur de la photographie

Suspiria

Après notre couverture du mois dernier, nous avons voulu revenir plus en détail sur l’événement Suspiria en compagnie d’un de ses principaux architectes, le chef-opérateur Sayombhu Mukdeeprom. Le Thaïlandais nous explique comment il a travaillé avec Luca Guadagnino pour aboutir à une approche radicalement différente de celle de leur modèle. Et en profite pour revenir sur la fructueuse relation qu’il entretient avec le réalisateur de Call Me by Your Name.
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Quelle a été votre première réaction lorsque l’on vous a proposé de travailler sur ce remake de Suspiria ? Plutôt excité, ou bien angoissé à l’idée de vous frotter à un tel classique ?

Non, je n’ai pas du tout été angoissé, même si je considère Suspiria comme un chef-d’oeuvre. Ça m’a plutôt intrigué.


Comment avez-vous défini le style de cette nouvelle version lors de vos premières discussions avec Luca Guadagnino ?

C’est en lisant le scénario que j’ai eu l’idée d’adopter ce style. J’ai trouvé le script intrigant et original, il a provoqué de forts sentiments en moi. J’ai eu envie de filmer le réel plutôt que de verser dans le surréalisme, et quand j’en ai parlé à Luca, il était d’accord avec moi. Notamment sur le fait qu’il ne fallait pas insérer de couleurs fortes. 


Vous avez tourné Call Me by Your Name avec un seul objectif, un Cooke S4 35 mm. Vous êtes-vous fixé des challenges de ce type sur Suspiria ?

Oh non, pas du tout ! Cette fois, nous ne nous sommes pas limités à un seul objectif. Nous avons eu recours à tout un tas de focales. J’ai dû utiliser un 10 mm, 12 mm, un 14 mm, un 16 mm, un 20 mm et un 24 mm. Toute la panoplie ! Luca et moi tenions à nous différencier de Call Me by Your Name, même si les deux films entretiennent des similitudes, notamment dans notre façon de gérer certains aspects visuels ou dont les comédiens réagissent face à la caméra. 



Vous avez précédemment déclaré dans un entretien que vous ne cherchez jamais à imposer votre style aux oeuvres que vous éclairez.

Pour moi, ce n’est pas le style qui compte, mais ce que le film raconte. Le scénario est toujours mon matériau de départ, car c’est lui qui donne vie au projet. Je cherche donc toujours ce qui se cache à l’intérieur, ce qu’on peut lire entre les lignes. Une fois que cette partie est faite, alors j’essaie de donner vie au scénario. Luca est comme moi : on ne parle jamais de style, mais des outils qui nous seront utiles pour parvenir à nos fins. À titre personnel, je ne « sens » pas du tout les caméras numériques. Je n’arrive pas à me connecter à ce que je filme quand je regarde le retour vidéo de ce type d’appareils. 


Le film de Dario Argento était cadré en Cinémascope alors que vous avez opté pour le ratio plus étroit du 1.85. Était-ce pour privilégier la verticalité de l’architecture ?

Oui, en partie. Mais la vraie raison pour laquelle nous avons choisi ce format, c’e [...]

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