Hellboy de Neil Marshall
Hellboy
Onze années se sont déjà écoulées depuis la sortie du formidable Hellboy II – les légions d’or maudites, grand écart virtuose entre les envies de blockbusters de del Toro et ses obsessions plus indés et cinéphiles. Juste avant le générique de fin, le Hellboy interprété par Ron Perlman rendait son insigne ; un geste finalement prémonitoire, aidant à appréhender cette nouvelle adaptation sans trop de douleur. Pendant son prologue pourtant, commenté par une voix off trop méta pour être honnête, le film de Neil Marshall inquiète. « Ce n’est pas moi qui ai eu l’idée du noir et blanc pour l’ouverture » se défend le directeur de la photographie Lorenzo Senatore. « Je crois que ça vient de l’un des producteurs. J’ai détesté le concept au début, mais au moment de l’étalonnage, j’ai commencé à embrasser l’idée. J’ai toutefois tenu à ce que l’on garde les rouges bien vivants. Avec le recul, je pense que c’était la bonne approche pour séparer ce prologue du reste du film. » On aurait sans doute apprécié une entrée en matière plus sérieuse, l’humour des comics émanant essentiellement du personnage de Hellboy.
LES GERMES DE LA RECONSTRUCTION
Passé ce prologue déstabilisant, Neil Marshall et son scénariste Andrew Cosby ont la bonne idée d’ironiser sur le départ de Guillermo del Toro, en montrant le Grand Rouge affronter un ancien partenaire sur un ring de catch mexicain. Libéré de son passé cinématographique, le film peut dès lors reposer son propre univers, quitte à revisiter en fin de premier acte la naissance de son héros. Raspoutine et Ilsa Hepstein répondent présents, mais la séquence se recentre sur le personnage de Lobster Johnson (Thomas Haden Church), AKA « La Pince de Homard », pourfendeur de nazis dont les activités vengeresses semblent sorties tout droit d’un serial des années 30. Embrassant cet héritage, qui imprégnait déjà les comics de Mignola, Marshall filme son Hellboy comme un détective baroudeur aussi maladroit qu’Indiana Jones, aussi sarcastique que Han Solo, mais capable d’affronter à mains nues les créatures les plus folles. Évoquant par son rythme le découpage nerveux et épisodique de la bande dessinée, le long-métrage se balade également volontiers à travers différents registres du cinéma d’horreur. « Naviguer à travers tous ces genres était le concept même du film depuis le départ » confirme Lorenzo Senatore. « Neil Marshall et moi, nous sommes de vrais cinéphiles geeks ; il était donc facile pour nous de plonger dans tous ces mondes presque simultanément, et il était d’autant plus amusant de jouer avec différentes techniques (par exemple des éclairages à la Fulci et des ralentis saccadés lors d’une attaque de morts-vivants, ou une métamorphose citant Le Loup-garou de Londres – NDR). Garder une cohérence visuelle était un défi mais je pense que nous nous en sommes plutôt bien sortis. Notre style de tournage changeait d’une scène à l’autre, en fonction des besoins de l’intrigue. Je pense qu’au final, c’est le look sombre mais très vibrant et coloré qui unifie l’ensemble. » Sans atteindre la finesse maniaque des films de del Toro, le production design et la photographie sont effectivement très cohérents, et traduisent visuellement la place d’outsider du protagoniste. Déjà au coeur des deux premiers films, l’aliénation de Hellboy est ici abordée sous un angle plus adolescent, rendant ses interactions avec le professeur Broom (excellent Ian McShane) très différentes de celles du duo Ron Perlman/John Hurt. « Le rouge est la couleur clé du monde de Hellboy » note Senatore, « et nous avons essayé d’éviter cette teinte pour la plupart des accessoires, des décors et des costumes. Nous voulions que le rouge de Hellboy ressorte encore plus au sein du cadre. Nous avons toutefois utilisé des tons ass [...]
Il vous reste 70 % de l'article à lire
Ce contenu éditorial est réservé aux abonnés MADMOVIES. Si vous n'êtes pas connecté, merci de cliquer sur le bouton ci-dessous et accéder à votre espace dédié.
Découvrir nos offres d'abonnement