Frankenstein

Présent dans HÔTEL TRANSYLVANIE 2, bientôt dans le DOCTEUR FRANKENSTEIN de Paul McGuigan avec Daniel Radcliffe et James McAvoy ainsi que dans deux séries TV, Frankenstein et son monstre reviennent en force sur les écrans. Le préambule à la célébration de son 200e anniversaire…
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Mi-juin 1816, dans les salons et chambres de la somptueuse villa Diodati du lac de Genève. Pour tromper leur mondaine oisiveté, l’écrivain Lord Byron, son secrétaire et médecin John Polidori, le poète Percy Shelley, sa femme Mary et sa demi-soeur se livrent à un concours de récits macabres. C’est à qui racontera le plus horrible… Quelques heures plus tard, Mary rêve son histoire, influencée par les récits de ses camarades de jeu et le traumatisme de la perte de son bébé de sept mois, l’année précédente. Elle rêve d’une créature, un homme conçu à partir d’autres hommes et qui, sorti d’une nuit d’orage, se penche sur son lit… Une image qui inspire le roman Frankenstein ou le Prométhée moderne. Des événements relatés par Ken Russell dans son fiévreux Gothic de 1986.Prométhée fait référence au Titan de la mythologie qui, en créant un homme à partir des entrailles de la Terre, défie Zeus et essuie son courroux. Le retentissement du livre est énorme, mondial. Bientôt, des dramaturges le portent sur les planches. Dès 1910, le cinématographe s’en empare, avec un premier Frankenstein signé J. Searle Dawley, digest de douze minutes. Lui succèdent en 1915 Life Without Soul de Joseph W. Smiley, et l’Italien Il Mostro di Frankenstein d’Eugenio Testa, massacré par la censure. Des films muets perdus ou tombés dans l’oubli, prémices d’une production qui n’ira qu’en s’amplifiant…

L’ÂGE D’OR

Lorsque, au tout début des années 1930, dans un certain climat de fronde entretenu par des cadres de la Universal et les garants de la morale hollywoodienne, Carl Laemmle Jr. décide de la mise en chantier de plusieurs films fantastiques, il ignore qu’il grave dans le marbre les noms de Dracula, de l’Homme Invisible, de la Momie, du Loup-Garou et, évidemment, de Frankenstein. Frankenstein qui, dans l’écume de Dracula en cette année 1931, est confié aux bons soins du Français Robert Florey, avec Bela Lugosi dans le rôle du monstre. Outre le fait que son égo n’apprécie guère la modestie qu’impose un épais maquillage, le comédien ne convainc pas. Il faut trouver un autre interprète pour la Créature : ce sera Boris Karloff, préféré à John Carradine. Pendant ce temps, James Whale, l’un des cinéastes majeurs du studio, s’intéresse au projet. Exit Robert Florey et Bela Lugosi qui, en lot de consolation, partent ensemble tourner Double assassinat dans la rue Morgue (1932). Avec James Whale à la réalisation, Boris Karloff en monstre pathétique, ainsi que Jack Pierce aux effets spéciaux de maquillage, Frankenstein trouve sa « dream team ». Certes, le scénario doit autant à la pièce de Peggy Webling qu’à sa source, le roman de Mary Shelley, mais tout y est déjà : l’apprenti sorcier, sa créature plus désemparée que réellement belliqueuse, la pression de villageois superstitieux… Et, sous l’influence de l’expressionnisme allemand relayé par le savant jeu d’ombre et de lumière du chef-opérateur Arthur Edeson et les décors de Charles D. Hall, James Whale choisit l’esthétique la plus adaptée à son sujet. Naissance d’un style, du cachet Universal, baroque et gothique, dont le Dracula de Tod Browning (1931) avait peu auparavant commencé à dessiner les contours.Produit pour à peine plus de 250 000 dollars, Frankenstein remplit les caisses de la Universal. On parle de recettes mondiales flirtant avec les 12 millions. Logique que Carl Laemmle Jr. demande à ce qu’une suite soit mise en chantier. Alors que Robert Florey se voit recalé pour la deuxième fois, James Whale revient aux affaires, plus confiant encore dans un style qu’il affirme avec La Fiancée de Frankenstein (1935). À distance égale du macabre, de la poésie et du mélodrame, cette séquelle surpasse son modèle par son envergure, des images plus travaillées encore, un discret humour et un Boris Karloff plus présent. Une pure merveille. L’engouement du public ne se dément pas. Il en redemande même : Universal lui donne, trois ans plus tard, en 1938, Le Fils de Frankenstein, où le fils du docteur reprend les travaux de son défunt père et réveille un monstre qu’un serviteur rancunier utilise pour se venger des jurés qui l’ont envoyé à la potence. Scénario un peu grossier, mais le réalisateur remplaçant de James Whale, Rowland V. Lee, sait y faire, exploitant avec brio l’imagerie expressionniste des modèles et la silhouette déjà iconique de Boris Karloff. Au terme de trois Frankenstein et autres La Momie, Boris Karloff n’en peut plus de porter des masques. Plus question d’incarner le Monstre, qu’il abandonne à d’autres acteurs au physique pas toujours adapté au rôle : Lon Chaney Jr. (une fois), Bela Lugosi (une aussi) et Glenn Strange (trois). Cinq Frankenstein supplémentaires, du Spectre de Frankenstein en 1942 à la parodie Deux nigauds contre Frankenstein datée 1948, en passant par Frankenstein rencontre le Loup-Garou (1943), La Maison de Frankenstein (1944) et La Maison de Dracula (1945). Des prolongations qui, à l’exception de la première, associent la créature à ses fameux collègues monstrueux. L’union fait la force commerciale. Si, après le départ de Carl Laemmle Jr., les restrictions budgétaires entraînent une baisse du niveau, les réalisateurs en poste (Erle C. Kenton, Roy William Neill et Charles T. Barton) se montrent des artisans capables, tous tenus au strict respect du cachet gothique de la saga, en dépit de scripts de plus en plus délirants, souvent plus proches de la bande dessinée que de Mary Shelley. Logique dans ces circonstances que la série s’achève sur un pastiche assumé : le Monstre y apparaît tel un grand épouvantail, une attraction de train fantôme, victime de la surexploitation et des bavures du tandem comique Bud Abbott/Lou Costello.


LES BISTOURIS DE LA HAMMER 

Le fantastique gothique de la Universal s’étant éteint à la fin des années 40, Frankenstein et sa créature disparaissent avec lui. Plus signe de vie pendant près d’une décennie, sinon par le biais d’un essai parodique français de trente minutes, Torticola contre Frankensberg (1952), animé par un débutant nommé Michel Piccoli en créature. Et puis, soudain, en 1957, Frankenstein s’est échappé !, petite production d’une obscure société britannique, la Hammer… Encore que l’initiative n’en revienne pas à ses patrons, mais à Milton Subotsky et Max Rosenberg, deux producteurs novices en quête d’un studio prêt à financer leur adaptation, « fidèle » de leur propre aveu, du roman de Mary Shelley. Refus de la Hammer, qui leur vole l’idée en mettant au travail un scénariste, novice lui aussi, nommé Jimmy Sangster. Et celui-ci de résumer le livre en un manuscrit d’une centaine de pages, partant du postulat classique du scientifique qui, à partir du cadavre d’un voleur, des mains d’un sculpteur et du cerveau d’un savant, croit recréer la vie dans toute sa perfection. Il se trompe, la « chose » qu’il génère, effrayée par elle-même, échappant à son contrôle… Une créature qui, copyright Universal oblige, présente le faciès d’un accidenté de la route derrière lequel se cache un certain Christopher Lee, partenaire de Peter Cushing dans le rôle du baron Frankenstein. Un tandem dirigé par Terence Fisher, cinéaste en ruptu [...]

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