Fantasia 2015

Avec quelque 135 longs-métrages projetés du 14 juillet au 5 août derniers, le festival montréalais défie toutes les lois du compte-rendu journalistique. Voici donc de brefs télégrammes sur nos favoris. Et tant pis pour les nombreux recalés, même s’ils n’étaient pas dépourvus d’intérêt la plupart du temps.

Pour commencer, honneur au bulldozer Sono Sion, présent avec pas moins de trois longs-métrages ayant raflé deux récompenses. Même si nous avons été un peu accablés par un Love and Peace sentant très fort le projet de coeur concrétisé sans recul (Prix du Public en section « asiatique », quand même), nous avons été littéralement sidérés par Tag, vainqueur de la compétition Cheval Noir. N’en déplaise à l’ami Fasulo, qui l’avait gentiment esquinté dans notre compte-rendu cannois, il s’agit d’un furieux chef-d’oeuvre où la course effrénée de l’héroïne à travers les univers parallèles devient une véritable affirmation de soi. Les plans insistants sur les petites culottes blanches prennent ainsi une valeur révolutionnaire et, pourquoi pas, résolument féministe. Le père Sono poursuit ainsi un itinéraire passionnant, après un Shinjuku Swan (triomphe au box-office local) qui pourrait, en quelque sorte, mettre en scène le héros de Love Exposure dans la peau d’un mac idéaliste au coeur du quartier rouge de Kabukicho.
D’une certaine manière, ces préoccupations imprègnent aussi Nowhere Girl, nouvel essai live de Mamoru Oshii, qui reprend le fétichisme du militarisme soviétique vert-de-gris d’Avalon pour aboutir cette fois à deux niveaux de réalité dont on ne saura jamais lequel est l’hallucination de l’autre. D’où une image extrêmement gonflée : le retour des menstruations, vu non comme une faiblesse féminine, mais au contraire comme un signe d’aptitude au combat. Même les blockbusters japonais de l’année semblaient décidés à ruer dans les brancards, tel ce Strayer’s Chronicle signé Takahisa Zeze qui s’inspire des X-Men tout en abordant de front des thèmes épineux, comme l’infertilité et l’impuissance sexuelle des mutants. Quant au très attendu Attack on Titan (de l’expert en SFX Shinji Higuchi) présenté en clôture, il frappe par le design dérangeant de géants aux airs d’abrutis consanguins, même si la chose ressemble hélas moins à une histoire complète qu’à un épisode-pilote introduisant une série annoncée de huit (!) longs-métrages.


CINQ DÉCOUVERTES

Cependant, la vraie perle résidait dans Fatal Frame, où la fascination saphique dans un pensionnat de jeunes filles intemporel débouche sur une histoire de possession, qui vire sans crier gare à l’emboîtement de scènes de rêve et de cauchemar. Mais alors qu’on pensait que la réalisatrice Mari Asato avait ainsi prématurément grillé toutes ses cartouches, les donzelles se mettent en devoir de démêler l’écheveau au fil d’une enquête vertigineuse, bénéficiant d’une superbe photo vaporeuse. De quoi retrouver foi dans les films de fantômes japonais, après le calamiteux Ju-on : The Final Curse pourtant signé Masayuki Ochiai. C’est aussi du côté des spectres nippons, revisités façon moiteur indienne, que lorgne l’acte central d [...]

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