DVD MAD (N°324)

Terreur à l’hôpital central

Il y a slasher et slasher : d’abord le modèle ordinaire, copie plus ou moins conforme des fondateurs du genre, Halloween et Vendredi 13, dont les tueurs se réduisent le plus souvent à des silhouettes frappant des adolescents ou jeunes adultes peu vertueux. Puis, il y a le slasher un peu plus évolué qui, bien qu’empilant les cadavres, explore l’esprit des psychopathes. Plus proche du Frank Zito de Maniac et du Norman Bates de Psychose que de Jason Voorhees, le Colt Hawker de Terreur à l’hôpital central entre dans la seconde catégorie, devenu tueur de femmes après avoir assisté dans son enfance à une violente dispute entre sa mère et son cher papa, la première ayant envoyé une casserole d’huile bouillante au visage du second. Colt en garde des séquelles, déterminé à faire payer à la gent féminine l’état végétatif dans lequel se trouve son géniteur depuis deux décennies. Une haine féroce qu’il exerce désormais contre Deborah Ballin, une journaliste TV dont le discours féministe lui reste en travers de la gorge. Colt la blesse et la poursuit jusqu’à l’établissement où elle est soignée. Tout l’enjeu du scénario, signé Brian Taggert (D’origine inconnue, Poltergeist III) réside à savoir comment le maniaque va parvenir à approcher une proie sur la défensive dans un hôpital sous bonne garde. Cette trame plutôt simple, Jean-Claude Lord l’illustre en tirant parti des coursives désertes d’une aile de l’hôpital Sainte-Anne-de-Bellevue de Montréal, où il plante ses caméras deux semaines durant en novembre 1980. Un réalisateur jusque-là très éloigné du cinéma de genre, lui qui se distingue auparavant avec le triangle amoureux sulfureux de Délivrez-nous du mal et Panique, où le réseau d’eau potable d’une grande ville est empoisonné. Dans le creux de la vague en raison de plusieurs flops, Jean-Claude Lord toque à la porte de son ami Pierre David, producteur de Chromosome 3 et Scanners de David Cronenberg, et qui vient justement de lancer Brian Taggert sur un script basé sur ses souvenirs d’enfance de l’hôpital où travaillait son père. La déferlante du slasher et la motivation d’investisseurs américains attirés par la fiscalité avantageuse mis en place par l’état canadien font le reste. Le second élément explique par ailleurs la présence en tête d’affiche de Lee Grant, une comédienne plutôt portée vers le cinéma engagé, oscarisée pour Shampoo, mais qui ne rechigne pas à s’aventurer dans le commercial comme en témoignent Les Naufragés du 747, Damien, la malédiction II et L’Inévitable catastrophe. « L’influence de Lee Grant sur le script fut prédominante » explique Taggert. « À la base, je devais simplement écrire une histoire qui fasse peur. Rien de plus, c’était le contrat. J’ai posé à Lee la question de ce qu’elle attendait du film, comment elle voyait son personnage. Elle m’a alors pressé de développer l’aspect féministe, de faire de Deborah Ballin autre chose qu’une banale victime, quelqu’un en accord avec ses propres convictions. » Brian Taggert donne satisfaction à la comédienne, soutenu par Jean-Claude Lord et Pierre David.
Dans Terreur à l’hôpital central, ce n’est pourtant ni Lee Grant, ni William Shatner (dans un rôle secondaire guère étoffé) qui retiennent l’attention, mais bien Michael Ironside en psychopathe, sadique, fétichiste, prompt à sortir le polaroïd pour immortaliser la terreur de ses victimes. Entre Scanners l’année précédente et Le Guerrier de l’espace la suivante, l’acteur grave durablement son image dans la mémoire des spectateurs. Méchant un jour, méchant toujours.

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