DVD/Blu-ray/VOD N°309

LA LONGUE NUIT DE L’EXORCISME I À LA RECHERCHE DU PLAISIR
Zone B/Zone 2. Le Chat qui fume. 
LOIN DES VILLES

Le Chat qui fume persiste dans son exploration ciblée du cinéma populaire transalpin avec la sortie d’une paire de giallos qui nous fait quitter les grands espaces urbains pour quelques paysages plus arides.

Non si sevizia un paperino (oublions l’opportuniste titre de sortie française, La Longue nuit de l’exorcisme), chef-d’oeuvre de Lucio Fulci, bénéficie d’une magnifique édition collector Blu-ray/DVD du Chat qui fume, dans une version intégrale en master HD avec quatre heures de bonus. Sans doute l’événement de l’année pour les amateurs de giallos. Difficile d’ailleurs de cataloguer ce film passionnant aussi simplement, tant il s’éloigne des codes habituels du genre pour se rapprocher d’une chronique rurale, menaçant à plusieurs reprises de basculer dans l’épouvante pure, et même dans la férocité grinçante de la grande comédie à l’italienne. Pourtant, quand Fulci entreprend Non si sevizia… en 1972, il désirait le cadre cafardeux des immeubles prolétaires de Turin. En s’installant dans la région désolée et écrasée par le soleil des Pouilles, dans le sud du pays, il crée une atmosphère étouffante et moite, dans un décor désespérant, abandonné, dévoré par la pauvreté, la superstition et le poids délétère de l’Église catholique. Des enfants y meurent, les uns après les autres, sauvagement. En semant les fausses pistes, Fulci utilise une grosse ficelle du giallo, moins par concession formelle que pour dresser une galerie incroyable de tares. La culpabilité serait partout. La misanthropie du maestro s’acharne autant sur les paysans arriérés du village que sur la police impuissante, le prêtre refoulé vivant avec sa mère, le journaliste en quête de sordide et la grande bourgeoise droguée et perverse. Il ne sauve pas même les jeunes victimes, filmées d’emblée comme des êtres cruels (un lézard visé au lance-pierres) et des voyeurs déjà obsédés par le sexe. L’impureté a déjà tout gangréné, rendant absurdes les motifs réels de l’assassin, qui souhaitait préserver les enfants dans un état théorique d’innocence en les supprimant. Cette dérision fait écho à l’une des séquences les plus célèbres du film, le tabassage à mort de la sorcière marginale, que les enquêteurs viennent d’innocenter. À coups de barres et de chaînes, dans un cimetière en ruines, sa chair éclate en gros plans gore sur la ritournelle sirupeuse d’une chanson de variété. Dans les bonus, tous les commentateurs soulignent la force magistrale de cette séquence qui se clôt sur le visage ensanglanté de Florinda Bolkan se traînant au bord d’une route, achevée par l’indifférence des vacanciers qui ne s’arrêtent pas. Si, comme nombre de giallos, La Longue nuit de l’exorcisme semble dénoncer le refoulement sexuel, Fulci dépasse cet enjeu classique pour laisser poindre un constat nihiliste glaçant. L’autre séquence phare montre une Barbara Bouchet nue séduisant un garçonnet. Tournée en champs/contrechamps et avec le recours en amorce d’une doublure de dos (le nain Don Semeraro), elle contribue au souffre du film. La thématique pédophile s’invite tout du long, sans pour autant que Fulci ne lui donne de bases tangibles. OEuvre immense et subtile, choquante, La Longue nuit de l’exorcisme a bénéficié d’une distribution magnifique (Tomas Milian, Irene Papas, Marc Porel, Bolkan) et annonce les débordements gore du cinéaste.
Autre édition magistrale et riche du Chat qui fume, en Blu-ray/DVD, l’inédit À la recherche du plaisir, traduction littérale du titre italien Alla ricerca del piacere, a également été réalisé en 1972. Giallo beaucoup plus secondaire, signé par un artisan modeste du bis, Silvio Amadio, il retient l’attention, lui aussi, en dédaignant les grandes métropoles pour égarer son héroïne (Barbara Bouchet, encore) dans les méandres d’une enquête au coeur d’une bâtisse isolée dans la lagune vénitienne. Elle s’est fait engager comme secrétaire d’un écrivain qu’elle soupçonne être le responsable de la disparition d’une amie. Le romancier et sa femme bisexuelle sont des dépravés, organisant des « drug parties » échangistes avec projections de pornos 8 mm. Lui semble animé d’un fort complexe de supériorité qui le prédestine au meurtre parfait. C’est Farley Granger, égaré dans la trivialité du bis, distant, donc idéal en libertin nietzschée [...]

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