DVD/Blu-ray/VOD N°290
La bataille des cinq armées version longue
DE PETER JACKSON
Zone All. Warner.
Comme le veut la tradition, le dernier volet du HOBBIT nous revient dans un montage revu et corrigé par Peter Jackson en personne. Si LA DÉSOLATION DE SMAUG avait déjà été grandement amélioré par sa version longue, LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES se voit littéralement transcendé.
C’est un fait désormais entendu, Jackson ne nous présente en salle qu’un aperçu de ses oeuvres, un avant-goût de ce que nous réserve leur édition spéciale. Rien, pourtant, ne pouvait nous préparer au choc de cet ultime director’s cut. Car c’est bien d’une version du réalisateur qu’il s’agit, comme le confirme un making of s’attardant, une fois n’est pas coutume, sur la postproduction des scènes inédites. Trois-cent-quatre-vingts plans, rien de moins, auront été conçus pour l’occasion, ressuscitant des séquences que Jackson avait dû laisser de côté pour l’exploitation initiale. Deux raisons à cela : en premier lieu, l’ambition desdites images aurait confronté Weta à des retards insurmontables. Voir les Elfes et les Nains se faire face est une chose, les voir s’entretuer aux portes d’Erebor en est une autre. L’un des principaux défauts de La Bataille des cinq armées, version cinéma, était justement son approche quelque peu elliptique de l’offensive, doublée d’un point de vue déséquilibré durant le second acte. En réintégrant plus de vingt minutes, Jackson redonne heureusement à la bataille la fluidité et la logique qui lui manquaient. Les Nains retrouvent aussi la place qu’ils méritent, de même que Dain, Thranduil, Gandalf, Radagast et Beorn, héritant tous d’un rôle proactif dans la résolution du conflit. La stratégie d’Azog et la progression de chaque belligérant (on peut désormais suivre l’avancée de chaque troll d’une scène à l’autre) gagnent enfin une limpidité étourdissante, en particulier dans le contexte par essence chaotique d’un film de guerre.
Grand amateur du genre depuis l’enfance (des extraits de ses courts-métrages Super 8 sur la Seconde Guerre mondiale sont inclus en annexe), historien avisé (ses commentaires sur les manoeuvres napoléoniennes ne laissent planer aucun doute à ce sujet) et stratège compulsif (Richard Taylor a quelques anecdotes à partager sur leurs parties de Risk), Jackson réussit avec la version longue de La Bataille des cinq armées un exploit narratif sans précédent. Un exploit rendu possible, paradoxalement, par les conditions de production très singulières du film, réalisé pour un bon quart en images de synthèse. Une fois encore, l’incroyable making of de 10 heures permet d’évaluer la minutie extraterrestre de l’équipe, et les efforts considérables fournis par l’ensemble des départements durant plus d’un an. Largement de quoi annihiler tout sarcasme sur la déshumanisation liée aux ordinateurs. Le médium, au contraire, permet au cinéaste de revenir à ses premières amours, en filmant lui-même la quasi-intégralité des morceaux de bravoure à l’aide d’une caméra virtuelle dernier cri. En l’état, La Bataille des cinq armées est donc probablement le délire jacksonien le plus pur depuis Bad Taste, sa créativité s’exprimant de la même manière qu’au temps du Super 8. Et de créativité, le film regorge désormais, une demi-douzaine de séquences inoubliables venant s’ajouter aux escarmouches parfois trop terre-à-terre de la version cinéma.
Un voyage inattendu avait marqué les fans avec sa furieuse poursuite dans les cavernes des Gobelins, La Désolation de Smaug culminait avec la séquence folle des tonneaux… Désormais, La Bataille des cinq armées atteint son climax lorsque les nains percent les rangs ennemis à bord d’un chariot blindé, tiré par une horde de boucs meurtriers. Longue de quatre minutes, la scène s’impose instantanément comme l’un des morceaux de cinéma les plus virtuoses jamais chorégraphiés par Jackson. À la vision de la séquence, on comprend également la seconde raison pour laquelle la plupart des meilleurs moments du film furent laissés de côté en 2014. Le cinéaste aura ainsi profité de son dernier périple en Terre du Milieu pour renouer, enfin, avec ses racines horrifiques. Ultra violent en version longue, et ne reculant devant aucune idée glauque (voir ce troll amputé des quatre membres, et piloté à l’aide de chaînes accrochées à ses globes oculaires !), La Bataille des cinq armées accumule décapitations, démembrements, crânes fendus, mains transpercées, corps désintégrés, carcasses écrabouillées et geysers de sang, le tout filmé avec une jubilation comparable à la scène de la tondeuse à gazon de Braindead. Le spectacle est total mais revient de loin, si l’on en croit le documentaire Nuages à l’horizon, où Peter Jackson, piégé par une préproduction écourtée suite au départ de Guillermo del Toro, doit composer avec des délais intenables, pour finalement repousser le tournage de la bataille d’une année entière. Sage décision.
Alexandre PONCET
L’Enfant miroir
DE PHILIP RIDLEY
Zone 2. Blaqout.
Il était plus que temps qu’un éditeur se penche sur ce magnifique cauchemar enfantin, premier film du trop rare Philip Ridley. C’est désormais chose faite, même si la HD n’est malheureusement pas au rendez-vous.
Trois films depuis 1990. Philip Ridley n’est clairement pas du genre stakhanoviste. Raison de plus pour chérir ses longs-métrages, L’Enfant miroir (1990), Darkly Noon (1995) et Heartless (2009). Le premier sort – ENFIN ! – en DVD dans notre beau pays grâce aux bons soins de Blaqout. L’occasion de célébrer la puissance d’un galop d’essai fulgurant narrant les tribulations de Seth (Jeremy Cooper), un gamin de neuf ans qui tente de sauver son grand-frère Cameron (Viggo Mortensen), de retour à la ferme familiale après avoir participé au programme atomique durant la Guerre du Pacifique, des griffes de Dolphin (Lindsay Duncan), une vampire esseulée. Du moins, c’est la façon dont Seth interprète le monde qui l’entoure. Car L’Enfant miroir est avant tout une balade tourmentée dans l’esprit d’un gamin qui modèle la [...]
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