Dossier Stephen King

Il suffit de parcourir notre hors-série Stephen King pour réaliser que les écrits du maître de l’horreur ont déjà nourri des kilomètres de pellicule, avec des destins plus ou moins heureux. Mais l’oeuvre du Binoclard du Maine ne cesse d’inspirer Hollywood, comme en attestent la sortie en vidéo de Cell Phone et surtout les futures sorties dans les salles de Ça – partie 1 et La Tour sombre, adaptations de deux de ses plus colossales histoires.
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Après son accident en 1999, la carrière de Stephen King avait connu une légère baisse qualitative, avec à la clé des romans moins porteurs en termes d’adaptations cinématographiques. Puis est venue l’heure du retour en grâce, notamment via son dernier chef-d’oeuvre en date, le magnifique 22/11/63. Bref, King reste le king, et la frénésie avec laquelle Hollywood s’empare de ses écrits présents et passés est là pour le démontrer. Son thriller Mr Mercedes est sur le point de devenir une mini-série chapeautée par David E. Kelley, tout comme la superbe saga Le Talisman (coécrite avec Peter Straub), cette fois sous l’égide de Steven Spielberg. Son récent Revival, l’histoire d’un prêtre reniant sa foi pour bafouer les règles de la nature, devrait être porté à l’écran par Josh Boone (Nos étoiles contraires), qui est également annoncé sur l’adaptation d’Histoire de Lisey et sur celle du Fléau. Car oui, nous en sommes à un point du cycle kingien où ses romans déjà adaptés subissent la loi du remake (comme l’oubliable Carrie de 2013). Outre Le Fléau donc, déjà visible sous la forme d’une mini-série réalisée en 1994 par Mick Garris, The Mist deviendra dès l’année prochaine une série pour Spike TV, après le film de 2007 de Frank Darabont. Mais dans la catégorie « remake d’adaptations », c’est bien celui de Ça qui focalise l’attention. 

IL EST RE-REVENU
D’abord parce que le roman de King, paru en 1988, est avec Stand By Me ce que l’auteur a écrit de plus profond et terrifiant sur les peurs enfantines et la difficulté de devenir adulte. Ce pavé d’une ambition narrative folle, où un groupe d’enfants livre une première bataille contre un monstre antédiluvien (prenant parfois l’aspect d’un clown), puis une seconde à l’âge adulte, a traumatisé toute une génération de lecteurs. Et sa très estimable adaptation sous la forme de deux téléfilms dirigés par Tommy Lee Wallace (titre français original : « Il » est revenu) a enfoncé le clou en 1990. Le roman méritait-il une nouvelle itération, cette fois destinée aux salles de cinéma ? Oui si l’on en croit Warner qui, en mars 2009, annonce la mise en chantier d’un film dont l’écriture est confiée à David Kajganich (Invasion, Blood Creek). Le scénariste, déjà auteur d’un remake de Simetierre avorté suite à un changement de direction à la tête de la Paramount, révèle que le studio cherche à produire un unique film de deux heures, ce qui n’enchante guère les fans du livre, et la promesse livrer une péloche R-rated ne console personne. Bref, ce Ça nouvelle cuvée semble bien mal barré. Du moins jusqu’en 2012, lorsque Warner annonce en grande pompe l’arrivée sur le projet de Cary Fukunaga, jeune surdoué ayant déjà à son actif le magnifique Sin nombre et le ténébreux Jane Eyre. Son embauche par la major rassure les fans, d’autant qu’il est à nouveau question d’un film en deux parties. Fukunaga obtient même de pouvoir d’abord tourner le saisissant drame de guerre Beasts of No Nation pour Netflix. Le succès critique et public de la saison 1 de True Detective enfonce le clou, et l’on se prend d’ores et déjà à rêver d’une adaptation ultime du livre, qui pourrait rejoindre Carrie, Shining, et quelques autres au firmament des films kingiens. 


CARY AU BAL DU DIABLE
Mais, car il y a souvent un « mais » à Hollywood – surtout quand un projet semble par miracle échapper à la logique mercantile des exécutifs –, les choses ne vont pas se dérouler comme prévu. Déjà en mai 2014, un premier indice avait mis la puce à l’oreille : les pontes de Warner décident de refiler le bébé à leur filiale New Line, la major préférant se concentrer sur des projets plus « high profile » (du genre Suicide Squad. Riez pas, ç’est pas sympa). Cette pratique plutôt inhabituelle annonce clairement une envie de faire rentrer le projet dans le moule de l’horreur mainstream à la Conjuring (gros carton estampillé New Line sorti l’année précédente), et induit en outre une baisse de budget. Et ce qui devait arriver arrive : un an plus tard, en mai 2015, alors que le premier film doit se tourner durant l’été de la même année, Cary Fukunaga quitte le navire. Les premières raisons avancées sont surtout d’ordre budgétaire, mais en septembre, le réalisateur décrit en détail au magazine Variety la couille qui a fait « plouf » dans le potage : « Je voulais faire un film d’horreur différent. Cela ne rentrait pas dans leurs [New Line] critères et ne cadrait pas avec leur politique de retour sur investissement, qui est de ne pas offenser le public de base des films de genre. Il n’y avait aucun problème avec le budget. C’est sur l’artistique que nous nous sommes battus. Je voulais essayer de faire un film d’horreur d’une grande qualité, avec de vrais personnages. Ils ne voulaient pas de personnages. Ils voulaient des archétypes et des jump scare. J’ai écrit le script (avec le scénariste Chase Palmer – NDR), et ils m’ont demandé d’en faire une version plus conventionnelle et inoffensive. Mais je pense qu’on ne peut pas vraiment faire du Stephen King si on le fait de façon « inoffensive ». ». Personne ne tombe des nues devant ces propos qui ne font que confirmer l’orientation adoptée par la plupart des studios dans le domaine de l’horreur. Fukunaga en profite pour expliquer enfin le film qu’il avait en tête : « Je voulais faire de Pennywise plus que le clown que l’on connaît. Cela fait 30 ans qu’on voit des méchants qui utilisent les peurs de leurs victimes, il fallait donc trouver une façon à la fois intelligente et sadiq [...]

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