Les séries horrifiques, cauchemars cathodiques

À l’occasion de la sortie en Blu-ray de deux films adaptés des Contes de la crypte et de la diffusion du Cabinet de curiosités de Guillermo del Toro sur Netflix, nous avons eu envie de célébrer les délices des anthologies horrifiques télévisées, exercice hérité de La Quatrième dimension et qui a bercé nos nuits blanches dès le début des années 1980. Revisitons ces heures glorieuses avec une sélection des épisodes les plus mémorables des séries emblématiques du genre.

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LA MAISON DE TOUS LES CAUCHEMARS

(HAMMER HOUSE OF HORROR, 1980)
S01E08 : Les Enfants de la pleine lune



En 1980, la Hammer fait figure de cadavre ambulant : le studio qui fut le roi de l'épouvante gothique dans les années 1960 connaît de grandes difficultés financières et sa dernière production horrifique en date, Une fille… pour le Diable, n’a remporté qu’un succès d'estime au Royaume-Uni grâce à un bouche-à-oreille insistant plus sur la nudité d’une Nastassja Kinski alors âgée de douze ans que sur les qualités réelles du film.

Créée par Roy Skeggs pour la chaîne ITV, la série La Maison de tous les cauchemars est le baroud d’honneur d’une firme désormais incapable de rivaliser avec la montée en puissance de l’horreur gore US menée par le trio infernal Romero/Hooper/Craven, et qui ne s’appuie que sur le sexe pour faire la différence. Le sang et la fesse n'étant pas forcément les bienvenus sur le petit écran, le show se rabat sur le fantastique old school qui fit la gloire du studio britannique et sur la terreur psychologique à la Rosemary's Baby.

L’occasion de redonner du travail aux vétérans de la Hammer en confiant le rôle d’un ancien nazi à Peter Cushing dans Le Cri ou la réalisation des treize épisodes de son unique saison à Peter Sasdy, Don Sharp, Robert Young ou Alan Gibson. Mais c'est au téléaste Tom Clegg (Cosmos 1999) que l’on doit Les Enfants de la pleine lune (Children of the Full Moon), où un couple perdu dans la campagne anglaise trouve refuge chez une vieille dame (Diana Dors, Théâtre de sang) qui élève seule un grand nombre d’enfants au comportement pour le moins étrange. Et pour cause : ce sont des loups-garous !

Nul doute que Joe Dante a vu cet épisode avant de tourner Hurlements : on en retrouve l’ambiance délicieusement angoissante où l'épouvante surgit dans un décor bucolique, Clegg arrivant à faire aussi peur que Les Vampires de Salem de Tobe Hooper lorsqu’un lycanthrope colle son mufle à la fenêtre de la chambre des héros. Relancé à mi-parcours par un twist qui aère la narration avant de la faire replonger en plein cauchemar, cet épisode rivalise aisément avec les meilleurs films produits par le studio britannique. Diffusée chez nous sur France 3 en 1983, la série ressurgit en 1984 avec treize téléfilms réunis sous le titre Histoires singulières


LE VOYAGEUR
(THE HITCHHIKER, 1983-1991)

S03E11 : La Dernière scène



Scénariste du slasher de Dick Richards La Vallée de la mort et du téléfilm de Wes Craven Invitation pour l'enfer, Richard Rothstein s’associe en 1983 à deux producteurs pour créer sur HBO Le Voyageur, show directement inspiré de la formule de La Quatrième dimension, avec un mystérieux auto-stoppeur (Nicholas Campbell puis Page Fletcher) présentant chaque épisode.

David Wickes (Jack l'Éventreur avec Michael Caine), Carl Schenkel (Out of Order), Phillip Noyce (Calme blanc), Mike Hodges (Flash Gordon), Christian Duguay (Planète hurlante) et Paul Verhoeven font partie des réalisateurs de cette série qui durera six saisons et sera diffusée chez nous sur Antenne 2 à partir de 1986 avant d’atterrir sur La Cinq.

Bon nombre d’épisodes sont dignes de louanges (Instincts meurtriers avec Franco Nero en psy pervers et manipulateur, Un si beau visage avec un transsexuel opéré par Robert Vaughn en chirurgien obsédé, et tous ceux réalisés par Noyce), mais le plus bluffant reste La Dernière scène (Last Scene), celui signé par Verhoeven.

Peter Coyote y joue un acteur raté devenu réalisateur qui tourne son premier film, un slasher bas de gamme avec une actrice ultra sexy mais tellement mauvaise qu’il décide de la mettre réellement en danger dans l’espoir de tirer d’elle une performance convaincante.

Dans un style furieusement eighties évoquant à la fois Body Double et le clip de Laura Branigan Self Control réalisé par William Friedkin, le cinéaste hollandais, fidèle à ses thématiques, déploie un univers sensuel et brutal à mi-chemin entre Le Quatrième homme et Basic Instinct avec un personnage féminin bien plus fort qu’il n’y paraît. L'épisode est un régal pour tout fan de Verhoeven qui se respecte et lui permettra d'entamer sa carrière hollywoodienne avec RoboCop


HISTOIRES DE L'AUTRE MONDE

(TALES FROM THE DARKSIDE, 1983-1988)
S04E09 : Sorry, Right Number



Après avoir fait un carton au box-office avec le film à sketches Creepshow, George Romero et le producteur Richard P. Rubinstein se tournent vers la télévision pour recycler la formule avec Histoires de l'autre monde. Pas pour longtemps pour Romero, qui écrit une poignée d’épisodes avant de laisser son collègue seul maître à bord pendant les quatre saisons que dure la série. L’occasion pour une partie de l’équipe de Creepshow (le maquilleur Tom Savini, le compositeur John Harrison et le chef-op’ Michael Gornick) de faire ses premiers pas dans la mise en scène.

À l’instar du film, deux histoires sont adaptées de Stephen King dont le mémorable Sorry, Right Number réalisé par Harrison. Mariée à un auteur de romans d’horreur, une femme reçoit un coup de téléphone inquiétant d’une personne dont la voix lui semble familière, mais qu’elle ne parvient pourtant pas à identifier. Elle va s’empresser de vérifier s'il ne s'agit pas d’un membre de sa famille, loin de se douter qu’un drame terrible va la frapper de plein fouet.

Le twist final a beau être assez prévisible, la manière dont l'histoire est articulée décuple la force émotionnelle de cet épisode où le surnaturel se joue avec perversité des tragédies humaines en les rendant encore plus douloureuses.

En France, seuls seize épisodes de la saison 1 sont diffusés sur Antenne 2 en 1986, avant de sortir en VHS sous le titre Contes des ténèbres. Rubinstein remet le couvert en 1988 avec une cinquième saison non officielle intitulée Monsters qui, comme son titre l’indique, met en vedette des créatures monstrueuses. Enfin, 1990 sonne la sortie du film Darkside, les contes de la nuit noire, encore une fois signé John Harrison, l’un des trois sketches étant écrit par Romero d’après une nouvelle de King. Ce qui n’empêche pas le résultat d’être encore plus raté que le déjà pas bien fameux Creepshow 2 ! 


LA CINQUIÈME DIMENSION

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