Des monstres attaquent Hollywood

Suite et fin de l’interview fleuve de Chris Walas, entamée dans les numéros 222 et 223 de Mad Movies. L’artiste revient pour vous sur ses tout-débuts, quelques séquences célèbres de Gremlins et divers travaux plus ou moins personnels, dont Arachnophobia.

Votre carrière a commencé plusieurs années avant que Rick Baker ne reçoive le tout premier Oscar des maquillages pour Le loup-garou de Londres. A l’époque, la profession était extrêmement limitée. Comment avez-vous atteint votre but ?
Quand je suis arrivé au lycée au New Jersey, mon désir de faire des films est devenu insupportable. Je suis parti pour Hollywood avec seulement 250 dollars en poche. J’ai décroché mon premier job à Los Angeles chez Walt Disney. Je travaillais au département livraison des médias éducatifs ; des romans-photos tirés de films, des livres, des choses comme ça. Ce n’était pas ce que je voulais faire à terme, mais à l’heure du déjeuner je pouvais traverser la rue jusqu’au studio et observer les tournages. J’adorais explorer les studios. Les animateurs de dessins animés y prenaient leur pause déjeuner, faisaient des tests d’aquarelle, griffonnaient sur leurs calepins… Ils étaient très amicaux et adoraient raconter des histoires sur l’époque où Walt Disney était encore à la tête du studio. J’ai appris beaucoup d’infos confidentielles grâce à eux, et le simple fait de pouvoir observer une équipe de tournage au travail m’a considérablement apporté. Ces repas en coulisses resteront toujours des souvenirs magiques pour moi, parce que ça a été la première fois dans ma vie où j’ai pu rentrer en contact avec des gens qui faisaient de véritables films.
Une autre étape importante dans mon apprentissage s’est faite via un job chez Don Post Studios. Ils concevaient des masques en latex de grande qualité et j’avais grandi en voyant leurs pubs au dos de Famous Monsters Magazine. J’y suis resté un an et j’ai gravi les échelons depuis un poste de peintre aérographe jusqu’à occuper un rôle important dans le laboratoire. J’y ai beaucoup appris – je connaissais déjà beaucoup de choses dans la théorie, mais j’ai pu enfin mettre tout ça en pratique. Avec mon arrivée dans le laboratoire, je me disais que, par chance, je pourrais enfin faire mon entrée dans le monde du cinéma. Don Post Studios travaillait régulièrement pour la télévision, fournissant à l’occasion masques et accessoires spéciaux. J’ai d’autant plus été anéanti quand mon patron m’a dit que l’entreprise allait abandonner définitivement le marché des médias pour se concentrer sur celui des masques. J’avais collaboré sur quelques projets avec d’autres employés de Don Post et je me suis associé avec l’un d’entre eux, Bob Short. Sa spécialité, c’était les accessoires sur mesure et la mienne les monstres, donc l’alliance paraissait cohérente. Mais nous nous sommes bientôt rendus compte que les studios recherchaient généralement une seule personne pour nos deux spécialités, alors nous nous sommes vite séparés.

Pour revenir à Gremlins, combien de Gizmos avez-vous créés au final ? Et de combien d’opérateurs aviez-vous besoin pour les animer ?
On me demande souvent combien de marionnettes nous avons construites pour Gremlins, et il est très difficile de vous répondre, compte tenu de la manière dont on a construit les marionnettes. Afin de pouvoir gérer les nouvelles demandes qui nous arrivaient constamment sur le film, j’ai choisi une approche un peu spéciale : nous construisions les marionnettes sur le plateau, à la demande ! C’est-à-dire que l’équipe ne devait pas seulement construire des marionnettes, mais aussi toute une réserve de membres de Gremlins et de Mogwais, membres que nous pouvions assembler rapidement dès qu’une idée fusait. Cette méthode a été très utile pour la scène du bar. Joe Dante avait dressé une liste d’idées et de gags liés aux Gremlins, des choses drôles ou angoissantes. Tout le reste de l’équipe a été invité à apporter ses propres idées, et d’une manière ou d’une autre, il nous fallait fournir les marionnettes pour concrétiser tout ça. De plus, il y avait un grand nombre de marionnettes partielles, à la fois pour les Gremlins et les Mogwais. Des paires de bras, de jambes, une tête et un cou seulement, des choses comme ça. Il faut garder à l’esprit que nous utilisions toute une série de visages différents pour les marionnettes des Mogwai, et la même marionnette a pu être utilisée pour plusieurs personnages différents, juste en changeant de tête. Si vous voulez des chiffres, je dirais que nous avons produit assez de membres pour donner vie à 134 Gremlins, et au moins à 35 Mogwais. Pour ce qui est des opérateurs, ça n’a pas arrêté de varier. Nous avions toutes sortes de marionnettes, allant de la simple chaussette avec seulement le mouvement de la bouche, jusqu’à ce qu’on appelait les super-marionnettes. Soixante-quatre câbles partaient des super-marionnettes de Gremlins, qui étaient opérées par 14 personnes. Même principe pour notre Gizmo à grande échelle. La marionnette typique nécessitait entre 4 et 12 opérateurs.

Comment avez-vous créé la naissance des quatre Mogwais sur le bureau de Billy ?
La reproduction des Mogwais a été un vrai défi, parce qu’elle devait être réalisée de la manière la plus simple possible. Et pour cause, tous nos efforts étaient concentrés sur la création des personnages eux-mêmes. Nous avons utilisé notre Gizmo à grande échelle pour tous les plans le montrant couché sur la table, hurlant de douleur. Nous avons utilisé un canon à air comprimé pour propulser les petites boules de poils. Puis nous avons créé des [...]

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