Cinéphages n°325

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BUMBLEBEE
2018. USA. Réalisation Travis Knight. Interprétation Hailee Steinfeld, Dylan O’Brien, Megyn Price… Sorti le 26 décembre 2018 (Paramount Pictures France).
Pour ne rien vous cacher, la perspective d’un nouvel opus de Transformers ne nous disait rien qui vaille, même s’il s’agit là d’une préquelle de la saga. C’était compter sans la présence de Travis Knight derrière la caméra. Venu de l’animation (il dirige Laika Entertainment et a réalisé le très beau Kubo et l’armure magique), le monsieur a le sens du rythme, de la belle image et de l’émotion brute. Taillé à une échelle plus intime que chez Michael Bay via une mise en scène carrée et dynamique qui évite de trop s’appuyer sur les money shots, Bumblebee est un peu l’héritier de Sauvez Willy ! (et plus récemment de Real Steel) et renoue avec la magie d’un cinéma de divertissement tendre et poétique, aidé par le fait que l’action se déroule en 1987. Le script joue adroitement sur la nostalgie : privé de la parole lors de son arrivée sur Terre, Bumblebee utilise les chansons qu’écoute l’adolescente qui l’a recueilli pour communiquer avec elle (Hailee Steinfeld est craquante) et le récit réserve de jolis clins d’oeil à John Hughes, WarGames et à la magie Amblin. Bumblebee est d’ailleurs bien plus proche de Ready Player One que des Transformers de Bay, même si l’influence de ce dernier se fait sentir à travers le personnage du militaire bourrin mais sympa joué par John « The Marine » Cena, la pyrotechnie agressive des scènes d’action et le fait que l’héroïne soit une lolita en short… Ce qui n’empêche cependant pas sa relation avec Bumblebee de constituer le coeur d’un film qui en a beaucoup. Spielberg, producteur exécutif de la chose, se serait-il un peu plus penché sur ce Transformers que sur les précédents ?

C.D. 



2036 ORIGINE INCONNUE
2036 Origin Unknown. G-B. 2018. Réalisation Hasraf Dulull. Interprétation Katee Sackhoff, Steven Cree, Julie Cox… Disponible en VOD.
Comme la plupart des aventures spatiales indé, 2036 origine inconnue fantasme de côtoyer 2001, l’odyssée de l’espace au panthéon de la science-fiction pour adultes. Ancien superviseur des effets visuels ayant fait ses armes à la télévision, Hasraf Dulull ne maquille même pas ses ambitions : le titre est une date futuriste, la principale menace du script une I.A. représentée par un oeil dénué d’émotion qui profère des horreurs avec un calme imperturbable… On a aussi droit à un monolithe noir en guise de « mystery box », et le final joue sur des visions spatiotemporelles exaltées. Dulull (dont le nom ressemble même à celui de Keir Dullea !) n’est malheureusement pas Kubrick et son utilisation abondante d’effets visuels, aussi honorables soient-ils, cache assez mal la vacuité thématique de sa mise en scène.

A.P.




CASSE-NOISETTE ET LES QUATRE ROYAUMES 
The Nutcracker and the Four Realms. 2018. USA.  Réalisation Lasse Hallström & Joe Johnston. Interprétation : Mackenzie Foy, Keira Knightley, Morgan Freeman… Sorti le 28 novembre 2018 (The Walt Disney Company France).
 Certes, il n’y a rien de plus subjectif que les goûts et les couleurs. Il est même carrément possible que certains spectateurs n’aient pas envie de se laver les yeux à la pierre ponce devant la direction artistique de ce film, quelque part entre la bourgeoisie clinquante des films Hunger Games et l’abomination visuelle des deux dernières versions hollywoodiennes d’Alice au Pays des Merveilles. Il paraît difficile de nier, en revanche, que les couches de meringue et la somme de choix esthétiques incongrus finissent par noyer tout projet de mise en scène, d’intrigue ou d’interprétation.

F.C.




MORTAL ENGINES
USA/Nouvelle-Zélande. 2018. Réalisation Christian Rivers. Interprétation Hera Hilmar, Robert Sheehan, Hugo Weaving… Sorti le 12 décembre 2018 (Universal Pictures International France).
Comme il l’expliquait dans le numéro 323 de Mad Movies, Peter Jackson devait réaliser lui-même Mortal Engines il y a dix ans de cela, avant que la tornade du Hobbit ne l’écarte du projet. Obligé de lancer la production sous peine de perdre les droits du roman de Philip Reeve, le réalisateur du Seigneur des Anneaux décide d’en confier les rênes à Christian Rivers, son story-boarder attitré depuis Braindead. À force de dessiner les visions de Jackson, Rivers a à l’évidence absorbé le style visuel de son mentor et s’y accroche sans scrupule tout au long de Mortal Engines. Pour le meilleur, une imagerie époustouflante, un gigantisme rare et la description incroyablement détaillée d’un univers de SF hardcore transpercent le Cinémascope dès les premières minutes. Mais la fragilité de la démarche est tout aussi flagrante, Rivers s’appropriant des tics de Jackson (travellings avant fulgurants, mouvements de grue circulaires en courte focale) sans vraiment savoir comment les monter. Passée une ouverture virtuose, Mortal Engines peine à trouver son rythme de croisière, le réalisateur enchaînant durant le premier acte des bourdes embarrassantes. Les orateurs sont souvent relégués hors champ, des mouvements aussi simples qu’un retournement de personnage sont découpés en trois ou quatre plans, la musique et le mixage assourdissants sont involontairement soulignés par une réplique de Robert Sheehan… Au terme d’une demi-heure en dents de scie, Rivers parvient heureusement à domestiquer le monstre. L’apparition du personnage de Shrike (Stephen Lang) et la relation poignante qu’il entretient avec une héroïne qu’il rêverait de transformer en poupée de porcelaine confèrent à Mortal Engines un écho émotionnel inattendu, dont la beauté sépulcrale rompt avec le tout-venant des productions « young adult ». Le studio voulait sans doute surfer sur le succès du Labyrinthe et de Hunger Games, mais Jackson, Fran Walsh et Philippa Boyens avaient vraisemblablement en tête une aventure opératique dans la droite lignée de Star Wars. Certes, la ressemblance entre certains personnages (dont une Han Solo au féminin et un jeune prolétaire qui rêve de devenir pilote) est un peu trop frappante, de même que le dispositif du climax, attaque d’une simili-Étoile noire par une flotte rebelle en sous-nombre. Mais le spectacle est tellement généreux et total qu’il emporte tout sur son passage, ridiculisant par sa perfection technique des blockbusters trois fois plus fortunés. Parvenant à recycler des figures propres aux cinémas de Lucas, Miyazaki ou Cameron pour offrir à son public une fantasmagorie visuellement novatrice (c’est d’ailleurs le sujet de l’intrigue, mue principalement par des historiens, des ingénieurs et des archéologues), Mortal Engines exprime peut-être de façon trop ardente son infinie candeur, à une époque où le public a appris par réflexe à s’en méfier… 

A.P.




AQUAMAN
USA. 2018. Réalisation James Wan. Interprétation Jason Momoa, Amber Heard, Patrick Wilson… Sorti le 19 décembre 2018 (Warner Bros. France)
L’enfer est pavé de bonnes intentions. Celles de James Wan sont admirables : célébrer l’Âge d’Or des productions Lucasfilm tout en ramenant l’univers DC sur un terrain réellement populaire. La double-séquence centrale, baladant le couple Jason Momoa/Amber Heard des dunes du Sahara à un petit village de Sicile (filmé au passage comme une publicité financée par l’office du tourisme local) montre à quel point le cinéaste rate sa cible. Quand il essaie de recréer la tension sexuelle qui entourait Indy et Marion, Wan cite involontairement Allan Quatermain, et arrose les dialogues de pizzicatos « rigolos » dignes de Desperate Housewives. Lorsqu’il essaie de rivaliser avec le plan-séquence des Aventures de Tintin, il répète accidentellement une scène de Valérian et la cité des mille planètes. Les nombreux hommages à Ray Harryhausen (Jason et les Argonautes, Un million d’années avant J.C., L’Île mystérieuse et Le Choc des titans sont directement cités) se prennent eux aussi les pieds dans le tapis numérique du projet, épaissi par une avalanche de gags parfois scatologiques et des scènes de « sea opera » aussi subtiles qu’un épisode de Power Rangers. Un personnage amusant (Black Manta) et quelques rares passages réussis (surtout l’attaque d’un banc de simili-créatures du lac noir) ne suffisent pas à excuser la nullité des enjeux, la superficialité de la réalisation, les tics de bande-annonce, l’idiotie du score et l’immondice des effets visuels.

A.P.




L’EXORCISME DE HANNAH GRACE 
The Possession of Hannah Grace. 2018. USA. Réalisation Diederik Van Rooijen. Interprétation Shay Mitchell, Kirby Johnson, Grey Damon… Sorti le 5 décembre 2018 (Sony Pictures Releasing France).
Lors de sa première nuit de boulot dans une morgue, une jeune femme reçoit un étrange cadavre, dont la séquence prégénérique nous a informés qu’il était celui d’une possédée ayant vraiment la vie dure… Comme on le voit, le sujet est très voisin de celui de l’intéressant The Jane Doe Identity, et la comparaison ne tourne pas en faveur de cet Exorcisme de Hannah Grace qui délaisse les mystères de son modèle au profit des problèmes psychologiques de l’héroïne, une ex-fliquette traumatisée se remettant peu à peu de son alcoolisme. Dommage, car le début témoignait d’une utilisation adroite du décor, celui d’un hôpital-bunker aux allures de sombre forteresse.

G.E.



LA PETITE SIRÉNE
The Little Mermaid. 2018. USA. Réalisation Blake Harris & Chris Bouchard. Interprétation William Moseley, Poppy Drayton, Loreto Peralta… Disponible en SVOD (Netflix).
Le conte originel est raconté dans un petit dessin animé sur lequel défile le générique. Le film proprement dit, lui, est une sorte de suite située dans l’Amérique des années 50. Attiré par la rumeur concernant un élixir miracle, un journaliste retrouve la petite sirène dans une fête foraine où un méchant magicien la tient sous sa coupe… Las, les pauvres enfants s’ennuieront ferme devant cette oeuvrette mièvre et asthmatique. Quant aux grands, ils penseront peut-être avec nostalgie aux films live jadis produits par Disney. Sauf qu’on est très loin de l’étonnant La Foire des ténèbres du grand Jack Clayton, auquel cette Petite sirène fait parfois penser.

G.E.




SPIDER-MAN : NEW GENERATION 
Spider-Man: Into the Spider-Verse. USA. 2018. Réalisation Bob Persichetti, Peter Ramsey & Rodney Rothman. Inte [...]

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